La décision rendue par la juge de la Cour supérieure de l’Ontario, Susan Himel, marquait hier un autre jalon dans la réflexion collective en cour au Canada sur la question de la prostitution. La juge Himel donnait 30 jours à la Couronne pour faire appel de sa décision de rendre inconstitutionnels les articles de loi criminalisant la prostitution. Il est donc tout à fait possible qu’il n’y ait bientôt plus de loi interdisant de communiquer, de vivre des produits de la prostitution ou de tenir une maison de débauche (articles de loi 210, 212(1)(j), et 213(1)(c) du Code criminel).
Les échos qui émanaient des média hier représentaient des points de vue opposés de la situation: d’une part, les réactions des tenants conservateurs (au sens large du terme) de la criminalisation de la prostitution et d’autre part, les réactions de certaines défenseur-es des droits et libertés des femmes impliquées dans l’industrie du sexe.
Ce portrait manque terriblement de nuances et évacue des aspects essentiels de la question. Il importe ici de ramener d’une part, la question du droit des femmes à la sécurité qui est au cœur de l’argument anti-criminalisation, et d’autre part, la question du droit des femmes à l’égalité qui ne figure pas dans les comptes rendus médiatiques qui nous sont proposés.
Pour ce faire, nous aurons recours à l’impressionnant rapport préparé par Shelagh Day, activiste féministe et récipiendaire de la Médaille de la Gouverneure Générale commémorant l’affaire « personne », intitulé La prostitution : une violation des droits humains des femmes pauvres. (Juin 2008, disponible à www.francofemmes.org/aocvf).
La contestation judiciaire de Terri Jean Bedford, Amy Lebovitch et Valerie Scott, est fondée sur l’argument selon lequel la décriminalisation complète de la prostitution offrira aux prostituées des lieux de travail plus sûrs et diminuera leur vulnérabilité aux préjudices physiques et psychologiques associés à la prostitution.