Cour suprême ou langues officielles: quelle loi modifier?

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Publié 27/07/2010 par Gérard Lévesque

Pour assurer aux juristes et aux justiciables le droit d’être entendus en Cour suprême du Canada par des juges qui peuvent comprendre sans l’aide d’interprète la langue officielle de la plaidoirie, les parlementaires doivent-ils modifier la Loi sur la Cour suprême, la Loi sur les langues officielles, ou ces deux lois?

Le 28 avril 2008, la Société Radio-Canada diffuse un reportage faisant état du fait qu’un juge de la Cour suprême serait unilingue anglophone.

Dès le lendemain, le ministre de la Justice du Québec (alors Jacques Dupuis) et le ministre de la Justice du Nouveau-Brunswick (alors Thomas Burke) signent conjointement une lettre au ministre de la Justice du Canada (Robert Nicholson) pour demander qu’à l’occasion des prochaines nominations à la Cour suprême, des candidats bilingues soient choisis et qu’à cet effet, le Comité consultatif de la Chambre des communes chargé d’évaluer ces candidats en fasse une exigence absolue.

Le 15 mai 2008, le député libéral Denis Coderre présente en première lecture le projet de loi C-548 visant à modifier la Loi sur les langues officielles afin d’étendre aux juges de la Cour suprême l’obligation relative à la compréhension des langues officielles.

Le 21 mai 2008, l’Assemblée nationale du Québec adopte à l’unanimité une résolution affirmant que la maîtrise de la langue française est une condition préalable et essentielle à la nomination d’un juge à la Cour suprême. Lors de leur assemblée des 12 et 13 juin 2008, les membres du Conseil général du Barreau du Québec donnent leur appui au principe du projet de loi C-548 et souhaitent son adoption par le Parlement du Canada.

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Le 5 juin 2008, le député néo-démocrate Yvon Godin présente, à son tour, en première lecture le projet de loi C-559 visant à modifier la Loi sur la Cour suprême en créant une nouvelle condition de nomination des juges de la Cour suprême selon laquelle ceux-ci devront comprendre le français et l’anglais sans l’aide d’un interprète.

La 39e législature du Parlement se termine toutefois sans que les projets de loi des députés Coderre et Godin atteignent l’étape de la deuxième lecture.

Dans le cadre de la 40e législature, le député Godin présente de nouveau son projet de loi lequel porte maintenant le numéro C-232: d’abord, durant la 1ère session, le 26 novembre 2008, puis au cours de la 2e session, le 26 janvier 2009.

Le projet est adopté en 2e lecture le 27 mai 2009 puis est étudié par le Comité de la Justice et des droits de la personne lequel fait rapport le 5 novembre 2009.

À l’ouverture de la 3e session, le
3 mars 2010, le projet de loi franchit de nouveau les étapes de la 1ère et 2e lecture et est encore étudié par le Comité de la Justice et des droits de la personne. Le 31 mars 2010, la Chambre des communes l’adopte en 3e lecture, par un vote de 140 contre 137. Le 13 avril dernier, le Sénat adopte le projet en 1ère lecture; le débat en 2e lecture va se poursuivre après la reprise des travaux le 28 septembre prochain.

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En préparation du débat qui aura lieu les 14 et 15 août prochain à l’assemblée annuelle de l’Association du Barreau canadien, le président de la Conférence des juristes d’expression française de common law, Maître Christian Michaud, a écrit un excellent texte sur le bilinguisme institutionnel à la Cour suprême.

Il conclut ainsi ce document de référence pour un projet de résolution:

L’évolution des droits linguistiques et l’importance d’assurer que chaque tribunal canadien assujetti au bilinguisme respecte l’harmonie linguistique canadienne et exerce un rôle de leadership comme véritable instrument de «bilinguisme institutionnel» signifie que la mise en œuvre du projet de loi C-232 sera un des moyens privilégiés par le Parlement pour assurer le respect et la mise en œuvre du contrat social canadien.

Dans cet esprit d’harmonisation des lois et des mesures concrètes pour la mise en œuvre de moyens réparateurs pour l’enchâssement de la protection des droits linguistiques de la minorité, la Conférence des juristes d’expression française de common law ne peut faire autrement que d’avaliser l’approche prônée par les parlementaires…

Le débat s’annonce fort intéressant puisque le projet de résolution, proposé par Maître Analea Wayne, vice-présidente de la Division de l’Alberta de l’ABC, tout en prônant le bilinguisme institutionnel à la Cour suprême et exhortant le Parlement à modifier le paragraphe 16(1) de la Loi sur les langues officielles afin d’assujettir la Cour suprême aux obligations linguistiques qui s’appliquent aux autres tribunaux fédéraux, affirme que l’incapacité d’être en mesure de comprendre les deux langues ne devrait pas empêcher une nomination à la Cour suprême et, en conséquence, demande de laisser tomber le projet de loi C-232.

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Pour plus de renseignements, consultez les documents suivants :

Lettre du 29 avril 2008 du ministre de la Justice du Québec et du ministre de la Justice du Nouveau-Brunswick au ministre de la Justice du Canada : http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=3905

Lettre du 21 juillet 2008 du bâtonnier du Québec au Premier ministre du Canada : http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=3906

Bilinguisme institutionnel à la Cour suprême du Canada: document de référence:
http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=3908

Texte de la résolution à débattre à l’Assemblée annuelle de l’Association du Barreau canadien, à Niagara Falls, les 14 et 15 août 2010 : http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=3907

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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