Corruption: un expert des motards explique leur fonctionnement

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Publié 05/09/2013 par Lia Lévesque (La Presse Canadienne)

à 13h04 HAE, le 5 septembre 2013.

MONTRÉAL – Les Hells Angels ont investi l’économie légale pour blanchir l’argent généré par la vente de stupéfiants, mais aussi pour pouvoir justifier leur train de vie en présentant un revenu légitime, a expliqué jeudi le sergent-détective Alain Belleau devant la Commission Charbonneau.

L’expert des motards a énuméré plusieurs secteurs de l’activité économique qu’ont ainsi pénétrés les Hells Angels, notamment l’industrie de la construction, les «gazonnières», mais aussi les équipes de sport professionnelles et semi-professionnelles, les placements hypothécaires et immobiliers, les services aux entreprises comme le placement de personnel et les compagnies de gestion.

Les industries les plus connues dans lesquelles les Hells Angels sont présents sont évidemment les bars de danseuses, les agences de placement de danseuses, les restaurants et bars, de même que les ateliers de motos, a noté M. Belleau.

Un relevé effectué en 2010 laissait voir que 75 pour cent des Hells Angels détenaient une compagnie à leur nom, sans compter ceux qui y étaient associés, a souligné le policier.

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Ces compagnies servent à blanchir l’argent provenant de la vente des stupéfiants, a-t-il expliqué, mais aussi à faire semblant d’occuper un emploi ou de gérer une entreprise qui apporte un revenu, ce qui permet ensuite de justifier leur train de vie, devant le fisc, en cas de poursuite devant les tribunaux ou d’enquête policière.

«Ceux qui vont vouloir faire le club vont devoir se forcer pour avoir des ‘business’ légales. Récemment, on a vu encore des membres des Hells Angels qui expliquent à d’autres qu’il faut se légitimer un revenu qui peut justifier leur train de vie pour être capable de vivre à l’abri de l’impôt», a résumé M. Belleau.

Mercredi, M. Belleau avait relaté que chaque membre des Hells doit donner une quote-part de 10 pour cent des revenus de ses activités criminelles à son chapitre. De plus, chaque membre est indépendant dans ses activités criminelles.

Il a aussi souligné que pour un corps policier qui voudrait infiltrer le milieu des motards, théoriquement cela prendrait une dizaine d’années, à cause des différentes étapes de la hiérarchie.

Culture de l’intimidation

Le sergent-détective de la Sûreté du Québec a aussi expliqué comment les couleurs et les vêtements des Hells servent à la culture de l’intimidation et de la violence par leur seule présence.

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M. Belleau a souligné que l’effet Hells Angels est si important que lorsqu’ils passent en groupe en moto, par exemple, les gens leur cèdent le passage, alors qu’ils ne le cèdent pas aux policiers qui les suivent en moto non identifiée.

Le respect du logo et des couleurs des Hells est si important que même les «prospects», les amis et les «hangarounds» du club n’ont pas le droit de monter sur une moto appartenant à un membre des Hells, et ce, même si cette moto doit par exemple être montée sur une remorque, a rapporté le policier.

«Ça fait partie de la culture et de la raison d’être, du mode de fonctionnement des Hells Angels d’utiliser l’intimidation et la violence. La violence et le meurtre ne sont pas un but recherché par les Hells Angels, mais vont être un moyen utilisé pour atteindre leurs fins», a affirmé M. Belleau.

«Contrairement au crime organisé traditionnel italien, eux, l’affichage, montrer leurs couleurs, être présents de façon visible, c’est extrêmement important, c’est un de leurs outils», a résumé la procureure chef, Me Sonia LeBel.

«On dit souvent le pouvoir de la patch, ‘the power of the patch’, c’est le pouvoir d’intimidation des couleurs des Hells Angels», a acquiescé le policier Belleau.

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