Contrebande et statut de la femme dans les Pays d’en haut

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Maryse Rouy, À l’Hôtel des Pays d’en haut, roman, Montréal, Éditions Hurtubise, 2020, 272 pages, 24,95 $.
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Publié 24/02/2021 par Paul-François Sylvestre

Sainte-Agathe-des-Monts attire les vacanciers depuis plus de cent ans. Cette métropole des Laurentides sert de toile de fond à l’intrigue policière imaginée par Maryse Rouy, autrice du roman À l’Hôtel des Pays d’en haut.

Il est aussi question du statut de la femme.

Prohibition

Nous sommes en 1925 et Sainte-Agathe est dry, c’est-à-dire soumise à la loi qui interdit la vente d’alcool.

Pour l’Hôtel des Pays d’en haut, le plus chic de l’endroit, cela pose un défi de taille. Les verres sont teintés pour cacher la bière servie aux clients qui ont commandé «un jus de pruche».

Le maire de Sainte-Agathe est aussi président de la Ligue de tempérance. La réussite ostentatoire du propriétaire de l’Hôtel des Pays d’en haut l’irrite au plus haut point, tout comme ses supposées accointances avec la mafia. Il n’hésite pas à le qualifier de «honte pour leur société par ailleurs si vertueuse».

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Laisser-aller de la morale

Le curé affiche des airs supérieurs et un ton sentencieux. Lui et ses ouailles les plus ferventes s’étranglent d’indignation en constatant un laisser-aller de la morale.

Selon cet homme d’Église, «le destin de la femme, si elle ne se donne pas au Seigneur, est de se consacrer à un époux et à sa famille. La nature l’a faite pour servir et procréer. Les femmes non mariées sont un fléau pour l’humanité.»

Amour lesbien

Fille du propriétaire de l’hôtel, Adèle ne cherche pas à se marier, ne cherche pas non plus la compagnie d’un homme.

Maryse Rouy aborde un sujet assez tabou en 1925, soit celui de l’amour lesbien. Le mot n’est jamais mentionné, mais on se demande s’il n’y aura pas une suite sur ce thème…

Une autre femme figure parmi les personnages qui ont de la trempe. Il s’agit d’une journaliste qui a séjourné à Montréal et qui revient à Sainte-Agathe. Jeune femme à l’allure moderne et émancipée, elle est aussitôt qualifiée de garçonne.

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Disparition suspecte

Lorsqu’un client montréalais disparaît après une randonnée en raquettes, la journaliste Danielle Blanchette, amie d’Adèle, insiste pour qu’on fouille sa chambre, à la recherche d’un quelconque indice.

Elle découvre un uniforme gris fer et un képi dont l’écusson proclame Police des liqueurs.

Le policier de l’endroit est aussitôt informé et prié d’enquêter. Sa réponse est directe et sans appel: «arrêtez de vous prendre pour une policière, mademoiselle Blanchette: c’est un métier qui n’existe pas. Laissez les choses sérieuses aux hommes.»

Meurtre sans cadavre?

L’agent refuse de croire qu’un crime sordide peut être commis à Sainte-Agathe. Lorsqu’une battue s’avère vaine, il proclame fièrement qu’un corps n’a pas été trouvé parce qu’un meurtre n’a pas eu lieu.

Que ferait-il si la Police des liqueurs était trouvée pendue…? Il s’acharnerait sans doute à dire qu’il s’agit d’un suicide et non d’un meurtre.

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Climat de médisances

Dans cette histoire, tous les ingrédients sont réunis pour que ça finisse mal. Ça en vient au point où il n’est plus question de gagner ou perdre de l’argent, mais de sauver sa peau.

À cela s’ajoute un climat de médisances, car il y a une employée qui se défoule en gratifiant son entourage de paroles méchantes bien senties dès que les choses ne vont pas comme elle l’entend.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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