Carnet de route: le Yémen

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Publié 01/05/2012 par Gabriel Racle

On a beaucoup parlé du Yémen, ces derniers temps, dans le cadre du printemps arabe, alors que des manifestations pacifiques, réprimées par la force, demandaient le départ du despotique président Saleh, en poste depuis 33 ans. Il a fini par partir en vue de se rendre aux États-Unis pour se faire soigner. Puis il se serait réfugié en Arabie saoudite.

Le Yémen

Que connaît-on réellement du Yémen? Ce n’est pas un pays à grande fréquentation touristique, et en dehors des informations générales d’attentats ou d’enlèvements et de manifestations dont la presse s’empare brièvement, nous ne connaissons guère ce pays, la vie qui s’y déroule, les richesses de son patrimoine culturel.

Le Yémen occupe une position stratégique à la base de la péninsule arabique, en bordure du golfe d’Aden au sud et de la mer Rouge à l’ouest, en bordure notamment du détroit de Bab-el-Mandeb, qui commande l’accès au canal de Suez. L’Arabie saoudite le borne au nord et le sultanat d’Oman à l’est.

L’histoire du Yémen est complexe. Sans vouloir la retracer ici, mentionnons que ce pays a connu une division entre le Yémen du Nord, devenu indépendant après la chute de l’Empire ottoman, et le Yémen du Sud, autonome après le départ des Britanniques qui contrôlaient cette zone.

En 1990, le Yémen du Nord et le Yémen du Sud ont fusionné pour former un seul État, la République du Yémen, avec pour capitale Sanaa.

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En route

Mais, en dehors de ces généralités, que sait-on du Yémen, de ce qu’on y voit, de ce qu’on y trouve, de ce qu’on y mange, de ses habitants et de leur mode de vie, de ce que l’on pourrait appeler le «Yémen profond», pour reprendre une expression à la mode? Pas grand chose, car ce n’est pas un pays très visité par le tourisme, en raison d’une réputation d’insécurité, fondée selon les régions.

Un livre très original et d’un grand intérêt apporte une réponse écrite et visuelle à nombre de ces questions: Philippe Bichon, Carnet de route. Yémen, Pau, BleuÉditions, environ 200 pages (non paginé. c’est un «carnet»). Ce qui frappe immédiatement en feuilletant ce livre, avant d’en prendre une connaissance détaillée, c’est son caractère extrêmement original et attirant. C’est vraiment un carnet de route dont la couverture reproduit le carnet cuir original.

C’est aussi le caractère manuscrit du texte, parfaitement lisible, illustré par de très nombreux dessins et aquarelles en couleur, qui nous font voir ce que le voyageur a vu et a pris le temps de reproduire.

Déjà, ce simple aperçu général a quelque chose de séduisant pour entreprendre avec le bourlingueur un voyage de découverte. En 1794, Xavier de Maistre avait imaginé un Voyage autour de ma chambre; avec Philippe Bichon, on réalise un voyage au bout du Yémen en restant dans sa chambre.

Comme l’écrit un critique, c’est «un joli dosage de textes et de croquis réalisés dans l’Arabie heureuse», le nom sous lequel le Yémen était connu dans l’Antiquité. Philippe Bichon nous «propose de découvrir le Yémen du bout de son pinceau», écrit son éditeur, et quel pinceau.

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Voyage

«Mes voyages, écrit Bichon, ont toujours privilégié la rencontre humaine et le partage culturel. Si mon humble témoignage peut adoucir les inégalités de ce monde et ouvrir les esprits, alors j’en serai heureux.» Pour des raisons de sécurité, l’auteur parle de deux voyages dans l’ouest du Yémen.

Glanons quelques remarques qui donnent une idée du récit. Le carnet complète le texte par les aquarelles.

Sanaa. «Comment ne pas rester ébahi devant ces maison-tours (ce terme a dû être inventé pour désigner cette architecture si typique) et leur architecture fabuleuse? Une telle harmonie se dégage de ces camaïeux d’ocre ornés de toutes ces décorations à la chaux sur les façades, aux formes géométriques variées…»

Al-Hajjabah. «Un accueil beaucoup plus chaleureux… je vais me plaire ici. Un dîner copieux et varié m’est servi dans le mafraj (salle), un endroit bien plus agréable que le lugubre restaurant avec tables et chaises de l’hôtel de Manakha.»

«L’incroyable village d’Al-Hajjah», titre d’une aquarelle double page d’un village haut perché, alors qu’un autre est «au bord du gouffre». Et combien d’autres tout aussi remarquables, et de portraits qui jouxtent une description. Impossible de tout mentionner, de tout résumer.

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Une aventure

La raison en est simple. En parcourant ce texte, on voyage avec l’auteur, on découvre ce qu’il voit, on participe à ses incidents de parcours, comme le jour où il s’aperçoit qu’il n’a plus son passeport, oublié dans un hôtel, ou lorsqu’il rencontre un guide parlant français, avec lequel il avait correspondu sur Internet.

Alors, on suit le voyageur, on le suit et on se perd dans les tréfonds du Yémen, les yeux pleins d’images et la tête de souvenirs. On y est allé, presque.

Un livre inoubliable, une aventure à tenter.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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