Aucun organisme ne réunit les forces vives de la francophonie à Toronto

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Publié 13/07/2010 par Paul-François Sylvestre

La géographe Anne Gilbert, de l’Université d’Ottawa, et huit spécialistes ont mené une recherche sur les pratiques et représentations des membres de diverses communautés francophones du Canada et sur les projets de leurs institutions respectives. Le résultat a donné lieu à un volumineux essai intitulé Territoires francophones: études géographiques sur la vitalité des communautés francophones du Canada. Toronto y fait piètre figure

Il fut un temps où plusieurs collectivités canadiennes-françaises formaient des communautés quasi homogènes ou des quartiers dans de grands espaces urbains.

On pense évidemment à Gravelbourg (Saskatchewan), Saint-Boniface (Manitoba) et Vanier (Ontario).

Or, les diverses analyses des chercheurs permettent d’avancer une thèse très forte: les communautés francophones ne bénéficient plus aujourd’hui des conditions nécessaires pour achever l’espace que l’histoire leur a légué. La géographie se fait pour elles difficile.

Tout l’enjeu de la vitalité communautaire des minorités francophones tient à la façon dont se vit au quotidien la relation entre les acteurs individuels et collectifs et à la tension qui en émerge.

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Les études présentées dans Territoires francophones en identifient les traces dans l’organisation de l’espace de la minorité, dans le paysage linguistique, dans les réseaux qu’elle tisse aux diverses échelles spatiales. L’environnement et le rapport majorité/minorité qui s’y profile, ont aussi retenu l’attention, depuis le village jusqu’à la métropole.

Capitale économique

Parlant de métropole, je me suis surtout arrêté à l’analyse qu’Anne Gilbert a faite de Toronto. Elle désigne cette ville comme «capitale économique de la communauté franco-ontarienne», Ottawa étant la capitale politique et Sudbury, la capitale culturelle.

Elle présente quelques chiffres: 33 315 personnes dont la première langue officielle parlée est le français, auxquelles il faut ajouter 28 275 personnes ayant l’anglais et le français comme première langue officielle parlée.

Selon l’étude menée en début d’automne 2004, l’usage du français est assez élevé avec la parenté et les amis, mais guère utilisé avec les voisins, dans les loisirs, dans les magasins et chez le médecin.

Comme on peut s’y attendre, les auteurs ne trouvent aucune concentration importante de francophones à Toronto. «Le quartier formé historiquement autour de la paroisse Sacré-Cœur, au nord du centre-ville, a presque disparu.» 

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Au point où l’on peut s’interroger, dans ce contexte, sur la pertinence du terme de «communauté francophone», dans son sens géographique tout au moins, pour décrire la réalité du français à Toronto.

Les conclusions auxquelles en arrivent les chercheurs ne sont guère rassurantes. À Toronto, écrivent-ils, il n’existe aucun pôle véritable de vie française, tant parmi les populations que dans les institutions. «Aucun grand projet, lit-on, ne rallie aujourd’hui les forces vives de la francophonie torontoise».

On souligne aussi que les organismes travaillent pour la plupart assez isolément. Il est fait mention que des tensions existent entre les organismes traditionnels et ceux qui sont issus de la nouvelle francophonie ontarienne, multiculturelle et non catholique.

Au moment de cette étude, poursuit-on, «aucun organisme ne semblait avoir réussi à réunir autour de lui les principales organisations du milieu et à avoir ainsi pris le relais d’une ACFO régionale fortement affaiblie par la dissolution de l’ACFO provinciale», remplacée en 2006 par l’Assemblée de la francophonie (AFO).

Pour de plus amples renseignements, prière de consulter Territoires francophones: études géographiques sur la vitalité des communautés francophones du Canada, essai sous la direction d’Anne Gilbert, Sillery, Éditions du Septentrion, 2010; voir particulièrement les pages 256-260.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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