Au pays d’Astérix

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Publié 24/04/2007 par Carl E Arkantz

Le premier tour des élections présidentielles passé, on pourrait se sentir soulagé. Le suspense n’aura pas duré très longtemps. Déjà sur CNN, vers 19h45 dimanche, les commentateurs faisaient état d’un résultat sans grande surprise. Soit! Si avec plus de 30% des suffrages Nicolas Sarkozy est sorti en tête, Ségolène Royal a sauvé la sienne et du même coup son parti.

On n’ose imaginer quelle aurait été la situation du Parti Socialiste, si une fois encore son candidat n’avait pu se qualifier pour le second tour. La bonne surprise, s’il y en a une, vient de l’excellent score de François Bayrou. Certes, la France ne semble pas encore prête à briser cet éculé clivage droite gauche, qui à mon sens est dénué de tout fondement, mais date est désormais prise pour une nouvelle donne politique.

L’autre surprise c’est l’érosion du Front National. Je ne voyais pas Jean-Marie Le Pen réitérer son exploit de 2002. Cela ne signifie pas qu’il faille enterrer le Front National. Loin de là.

Reste le vote protestataire de la gauche extrême anti-libérale. L’émiettement des voix aura fait mentir son succès lors du référendum du 29 mai 2005 avec la victoire du Non à la Constitution européenne. On croyait cette gauche-là plus forte mais le morcellement des candidatures et l’impossibilité de s’unir derrière un seul et même candidat aura causé sa perte.

On me rétorquera qu’il y a eu l’effet du vote utile, et le spectre du 21 avril 2002. Peut-être mais l’explication ne suffit pas. Le discours anti-ceci ou anti-cela séduit sans doute une frange de la population au-delà des militants de terrain et des batteurs de pavés. Je lisais il n’y a pas si longtemps les propos d’une militante de la LCR affirmant que si Sarkozy était élu, l’extrême gauche serait dans la rue.

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Ces propos n’ont-ils pas été repris par Olivier Besancenot qui, tout en appelant à battre la droite, a ajouté dans les urnes et dans la rue. N’assiste-t-on pas à une forme de rejet de la démocratie? Pourquoi la rue devrait-elle remettre en question le résultat des urnes? Depuis quand la rue gouverne-t-elle? Voilà les séquelles de l’irresponsabilité que je dénonce et que je combats.

On peut être d’accord ou non avec une politique. On le manifeste démocratiquement, puisque nous vivons dans un pays libre. De cette liberté-là, parfois chèrement conquise, nous devrions être fiers. Le libéralisme vient lui aussi de la liberté. Certes, les dérives d’un certain libéralisme ou prétendu tel exacerbe les aigreurs.

N’oublions pas que les dérives d’un soi-disant communisme a galvaudé le principe même de l’idéal communiste. Cela n’a pas empêché les uns comme les autres à de fâcheux amalgames. Amalgame dont José Bové n’est pas en reste en qualifiant Nicolas Sarkozy d’homme dangereux. Il est vrai que notre faucheur de marguerites et démonteur de Mc Donald sait de quoi il parle. Je milite comme lui pour le terroir. Mais légalement. C’est la seule différence.

Que dire du résultat du Parti communiste. Personnellement, il me désole de voir qu’au fil des échéances électorales le parti se désagrège sans que ses dirigeants ne remettent en question leur stratégie. Est-ce à dire que le parti n’a plus sa raison d’être? Je n’en crois rien. Je connais et je fréquente nombre de communistes et je les respecte, même si je ne partage pas leur point de vue, si ce n’est sur la valeur du travail. Valeur dont les communistes ne sont point avares. Ils en ont le culte.

Quoiqu’il en soit, avec leur 10%, les formations de la gauche et les écologistes ont appelé à voter pour Ségolène Royal, les uns avec conviction, beaucoup du bout des lèvres comme l’indéboulonnable Arlette de Lutte Ouvrière.

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À droite, Philippe de Villiers aura eu le mot juste: «Je ne suis pas propriétaire de mes voix.» En effet, l’électorat est une entité souveraine qui décidera de son plein gré qui elle voudra soutenir. Et il faudrait que Mademoiselle Le Pen sache qu’un électorat n’est pas une marchandise qui se vend, puisque ni elle ni son parti ne peuvent prétendre disposer des voix qui se sont reportées sur Jean-Marie Le Pen.

Un partout, la balle au centre. L’arbitre de la rencontre sera François Bayrou. Que décidera-t-il? Soutiendra-t-il la candidate socialiste qui ne peut refuser l’alliance des écologistes et de l’extrême gauche, dont les centristes sont aux antipodes? Enterrera-t-il la hache de guerre avec l’UMP quitte à perdre son électorat social-démocrate? Personne ne peut prédire ce que feront ses électeurs.

Jamais élection présidentielle n’aura été aussi ouverte. D’un côté la rupture, le dynamisme et un franc-parler qui dérange, de l’autre plus d’État, la promesse d’une autre République – laquelle? Celle de la VIe?–, moins d’innovation et plus de doctrine, même si cela est incarné par une femme, cela suffit-il à convaincre?

Nous nous croyons d’irréductibles gaulois, ayant toujours raison même lorsque le monde change. Nous croyons en notre modèle, en nos acquis, en nos certitudes en oubliant que tout évolue autour de nous, que rien n’est permanent et que l’indépendance n’est qu’un leurre. Pourtant, au Pays d’Astérix, nous devrons choisir notre destin. Mais rien ne sera joué jusqu’aux prochaines élections législatives, en espérant que là encore le seul gagnant soit la démocratie avec une participation encore plus importante.

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