Attention aux coupes budgétaires, prévient Graham Fraser

Rapport du commissaire aux Langues officielles

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Publié 25/10/2011 par l-express.ca

Les futures coupes budgétaires orchestrées par le gouvernement fédéral ne doivent pas entraver la défense et la promotion des langues officielles en milieu minoritaire, s’inquiète Graham Fraser, commissaire aux langues officielles. Dans le but de préserver la vitalité des communautés en milieu minoritaires, il demande au premier ministre de modifier une partie de la Loi sur les langues officielles. Ces propos sont issus du rapport annuel du commissaire, son cinquième, déposé le 18 octobre au Parlement.

La restructuration financière lancée par le gouvernement Harper, connue sous l’appellation Plan d’action de réduction du déficit, demande aux ministères de réduire de 5 ou 10 % leurs dépenses.

Graham Fraser se dit préoccupé par cette mesure. «Je ne prétends pas qu’on cible particulièrement les langues officielles – ni qu’elles devraient faire exception à la règle, mais il y a un danger qu’elles soient indument touchées. […] Si chaque institution procède, de façon indépendante, à des coupures dans les programmes qui touchent les langues officielles, l’effet cumulatif sera beaucoup plus important que 5 ou 10 %.»

La partie VII de la Loi

Cette année, le commissaire aux langues officielles met largement l’accent sur la partie VII de la Loi sur les langues officielles, qui traite de la mise en place des mesures positives pour les communautés francophones et anglophones partout au pays.

Modifiée en 2005, la partie VII de la Loi doit devenir une priorité du gouvernement fédéral répète Graham Fraser. Une de ses recommandations vise d’ailleurs une nouvelle modification «pour permettre une application plus cohérente de la Loi».

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Dans son rapport, le commissaire énumère les avantages du bilinguisme canadien, qui a semble-t-il le vent en poupe même si cela peine à se traduire en action dans certaines institutions fédérales.

Graham Fraser pointe spécifiquement du doigt les décisions fédérales nuisant aux communautés de langues officielles en situation minoritaires et prises sans consultations de ces communautés, telles que les compressions budgétaires visant CBEF Windsor ou encore le remplacement du questionnaire complet obligatoire du recensement par une enquête volontaire.

Intitulé Du leadership, de l’action, des résultats, le rapport se réjouit que la dualité linguistique canadienne reste au cœur des débats (comme l’affaire Thibodeau c. Air Canada).


«Il est toujours utile de remettre les pendules à l’heure», a déclaré Graham Fraser lors de la présentation de son rapport. Il appelle d’ailleurs le gouvernement du Canada, cinq ans après la modification de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, à «affirmer haut et fort que le respect proactif et intégral de la Loi constitue une priorité».


Considérant le bilinguisme comme un atout qui est «désormais nécessaire pour maintes entreprises canadiennes», Graham Fraser espère que le gouvernement fera preuve de leadership, par exemple en confiant au Conseil du Trésor la surveillance de l’application de la partie VII de la Loi, «au moyen de politiques, de directives et, au besoin, d’un règlement».


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La Loi sur les langues officielles, un outil majeur


Outre les recommandations et des enquêtes sur les agissements de différents acteurs, le commissariat traite également bon nombre de plaintes, 1116 au total, dont 52 % à trait à la langue officielle dans le milieu du travail. Selon le commissaire, «ces données reflètent une situation qui perdure depuis de nombreuses années».


À la fin du rapport, le commissaire distribue les bons et les mauvais points de 13 institutions fédérales quant à l’application et la volonté de promouvoir la partie VII de la Loi. Patrimoine Canada, coordonnateur de la mise en place de la partie VII obtient un A mais la plupart des autres agences, comme Agriculture et Agroalimentaire Canada, Conseil de recherches en sciences humaines, Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Infrastructure Canada, Conseil des Arts du Canada, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada obtiennent la note B quant Affaires autochtones et Développement du Nord Canada n’obtient qu’un D.


Graham Fraser conclu son rapport en soulignant que la partie VII de la Loi sur les langues officielles «constitue l’un des instruments principaux de la dynamisation et la valorisation de la dualité linguistique canadienne» et qu’elle mérite que «l’on s’y attarde immédiatement, puisque la manière dont les institutions fédérales l’appliquent demeure inconstante.


C’est pourquoi le commissaire souhaite une responsabilisation rapide du gouvernement et d’une prise de leadership pour créer un cercle vertueux.


Les recommandations


Le commissaire aux langues officielles recommande au premier ministre du Canada de modifier la partie VIII de la Loi sur les langues officielles afin de confier au Conseil du Trésor les responsabilités suivantes: établir des principes d’application de la partie VII; recommander au gouverneur en conseil des mesures réglementaires d’application de la partie VII; donner des instructions pour l’application de la partie VII; et informer le public et les institutions fédérales sur les principes et programmes d’application de la partie VII.


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Le commissaire aux langues officielles recommande au premier ministre du Canada et au ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles de communiquer clairement leur engagement à l’égard de la partie VII de la Loi sur les langues officielles et de faire savoir qu’ils jugent important et prioritaire que toutes les institutions fédérales prennent des mesures positives pour faire la promotion du français et de l’anglais et pour appuyer le développement des communautés de langue officielle;


Le commissaire aux langues officielles recommande au greffier du Conseil privé de prendre des moyens pour responsabiliser davantage les hauts dirigeants fédéraux en ce qui a trait à la manière dont leur institution met en oeuvre la partie VII de la Loi sur les langues officielles et de veiller à ce qu’ils rendent compte au public canadien des résultats obtenus en cette matière;


Le commissaire aux langues officielles recommande aux hauts dirigeants des institutions fédérales de mettre en oeuvre la Loi sur les langues officielles de façon intégrale, c’est-à-dire d’inclure la partie VII dans les processus décisionnels de leur institution fédérale.


Le commissaire aux langues officielles recommande au président du Conseil du Trésor d’établir d’ici le 30 novembre 2012 que le niveau minimal des compétences linguistiques requis soit de CBC/CBC pour superviser des employés travaillant dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail.


Le commissaire aux langues officielles recommande au ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités d’apporter, d’ici le 31 mars 2013, les modifications législatives nécessaires pour clarifier les obligations linguistiques des autorités aéroportuaires et, ainsi, confirmer le droit du grand public de communiquer avec ces dernières et d’en recevoir les services dans l’une ou l’autre des langues officielles, conformément à la partie IV de la Loi sur les langues officielles.

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LES RÉACTIONS

La Fédération des communautés francophones et acadienne
 :

«Ce qu’il y a de nouveau et de différent dans le propos du commissaire Fraser cette année, c’est qu’il ouvre la porte à des modifications législatives à la Loi sur les langues officielles et qu’il interpelle directement le premier ministre avec deux recommandations qui ont trait au leadership du gouvernement du Canada. C’est rare qu’on voit notre commissaire aller aussi loin et il faut l’en féliciter.»


«Malgré ces obligations, on voit encore peu de résultats à l’heure actuelle parce que les institutions fédérales sont trop souvent laissées à elles-mêmes. Il faut une autorité centrale qui puisse encadrer la façon dont cette partie de la Loi est appliquée».


«Le commissaire Fraser a raison de rappeler que les responsabilités en matière de langues officielles, y compris celle de promouvoir la dualité linguistique, incombent avant tout au gouvernement du Canada, et cette observation est particulièrement pertinente dans un contexte où l’on recherche des économies et des efficiences dans les programmes et les dépenses du gouvernement.»


– Marie-France Kenny, présidente de la FCFA

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NPD
 :

«Pour le NPD, le rapport du commissaire est sans équivoque, explique le député. Le ministre des Langues officielles, James Moore, et le président du Conseil du Trésor, Tony Clement, échouent à leurs responsabilités fondamentales. Prenons par exemple Tony Clement. Il est capable de donner des bonus aux gestionnaires pour qu’ils fassent plus de compressions, mais il est incapable d’envoyer une directive gratuite à l’ensemble des institutions pour qu’elles respectent la Loi.»


«Les recommandations du commissaire sont toutes importantes, notamment la première, qui est d’une importance cruciale. Elle a le potentiel de faire appliquer la Loi intégralement. Ce que le commissaire propose, c’est le minimum que le gouvernement doit faire. Si le premier ministre n’accepte pas la recommandation du commissaire, on pourra tirer la conclusion qu’il s’oppose à la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles. Voilà pourquoi je presse le premier ministre de répondre au commissaire dans les plus brefs délais.»


Pour le NPD, la partie VII de la Loi sur les langues officielles vous concerne toutes. Vous avez des obligations et vous devez considérer les besoins et particularités des communautés de langue officielle dans vos décisions.


«C’est une priorité pour le NPD et pour le commissaire.»


–Yvon Godin, porte-parole du NPD en matière de langues officielles.

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Parti libéral
 :

«Le rapport 2011 du Commissaire des langues officielles expose le manque flagrant de leadership des conservateurs, et malheureusement, ce n’est une surprise pour personne. Voilà maintenant 6 ans que la partie VII de la Loi sur les langues officielles a été modifiée, mais toujours aucune instruction n’émane du gouvernement quant à son application.»


«Pour ce qui est de l’utilisation de la langue en milieu de travail, ce rapport nous dévoile que les 13 institutions fédérales évaluées sont incapables d’encourager un milieu de travail effectif dans les deux langues, que ce soit par manque d’initiative ou de volonté. C’est triste, c’est inacceptable. Ça va à l’encontre de nos intérêts nationaux.»


– Mauril Bélanger,
 porte-parole du Parti libéral en matière
 de langues officielles.

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