Appels frauduleux: un contractuel du Parti conservateur explique l’astuce

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Publié 02/03/2012 par Steve Rennie (La Presse Canadienne)

à 19h35 HNE, le 2 mars 2012.

OTTAWA – Si les enquêteurs d’Élections Canada soupçonnent que l’équipe conservatrice de la circonscription de Guelph a fait affaire avec une centrale téléphonique d’Edmonton pour loger des appels automatisés trompeurs, on peut d’ores et déjà affirmer qu’ils ont raison sur toute la ligne.

C’est du moins ce que prétend l’un des membres de premier plan de l’équipe du candidat conservateur Marty Burke, qui avait été battu par le candidat libéral dans cette circonscription ontarienne.

Le directeur adjoint de la campagne de M. Burke, Andrew Prescott, soutient qu’il peut expliquer pourquoi la centrale téléphonique RackNine ne figure pas sur la liste des dépenses électorales qui a été soumise à Élections Canada — même si la compagnie en question a logé à de nombreuses reprises des appels automatisés auprès d’électeurs conservateurs de Guelph.

Andrew Prescott dit être propriétaire d’une petite entreprise qui a un compte chez RackNine. La centrale téléphonique albertaine, précise-t-il, a donc tout simplement facturé les appels à son nom.

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Au cours d’un entretien avec La Presse Canadienne, M. Prescott a déclaré qu’il avait été approché par l’équipe de campagne de Marty Burke pour qu’il loge les appels pour elle, ce que le principal intéressé dit «avoir déjà fait pour d’autres campagnes pendant un certain nombre d’années».

Il a ajouté que ses dépenses lui avaient été directement remboursées.

Des documents déposés à Élections Canada montrent qu’Andrew Prescott avait paraphé un contrat avec l’équipe de campagne de Marty Burke. L’entente prévoyait le versement d’un montant de 1100 $ pour un «travail d’ordre général».

D’autres employés de l’équipe de M. Burke ont signé des contrats dont les termes sont similaires. La rémunération diffère d’une personne à l’autre.

Élections Canada enquête sur des informations selon lesquelles des électeurs de la circonscription de Guelph ont reçu des appels provenant d’un numéro dont l’indicatif régional est le 450 — en banlieue de Montréal. On disait aux électeurs, lors de ces appels, que leur bureau de scrutin avait changé d’adresse, ce qui était faux.

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Les registres téléphoniques montrent que le numéro était enregistré au nom d’un certain «Pierre Poutine», résidant de la rue «Séparatiste» à Joliette.

31 000 plaintes

Élections Canada a reçu quelque 31 000 plaintes au sujet des appels frauduleux qui ont été logés au cours de la dernière campagne électorale. En révélant ce nombre, le bureau du Commissaire aux élections fédérales avait confirmé vendredi qu’il a ouvert une enquête.

Élections Canada a reçu un volume important de plaintes au cours des derniers jours, après que les médias eurent révélé que l’organisme enquêtait sur au moins une affaire d’appels trompeurs, à Guelph, en Ontario.

Les partis d’opposition ont encouragé les électeurs qui auraient été victimes de ce stratagème dans d’autres comtés que Guelph à porter plainte. À la Chambre des communes, depuis plusieurs jours, l’opposition réclame une enquête plus large, voire une enquête publique.

Les électeurs qui se sont manifesté affirment avoir été appelés par des personnes se présentant faussement comme des employés d’Élections Canada, les dirigeant vers un faux bureau de vote. Empêcher les citoyens de voter est un acte illégal, selon la loi électorale.

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«Le Commissaire aux élections fédérales a l’autorité, durant des périodes de haut achalandage, de contracter des ressources additionnelles ou de demander l’aide et l’expertise d’autres agences, comme la GRC», peut-on lire dans le communiqué de presse d’Élections Canada. L’organisme tente manifestement de rassurer ceux qui croient qu’il n’a pas les ressources nécessaires pour faire face à des dizaines de milliers de plaintes.

Ce dernier développement a bien sûr alimenté les attaques de l’opposition à la période des questions matinale de vendredi. Les conservateurs maintiennent qu’ils n’ont rien à se reprocher.

«Nous avons dirigé une campagne de façon éthique et honnête. Et nous sommes tout à fait prêts à coopérer avec Élections Canada», s’est contenté de répéter à plusieurs reprises le député Pierre Poilièvre, chargé de défendre, en français, son parti. Pour sa part, son collègue Dean Del Mastro qui intercepte les attaques en anglais, a repris son mantra d’il y a deux jours: «C’est de la diffamation, sans fondements.»

«Quoi que les conservateurs disent (…), quelque chose s’est passée aux dernières élections», maintient le chef libéral par intérim Bob Rae. «Trente et un mille plaintes, c’est extraordinaire!», s’est-il exclamé en point de presse, à l’extérieur des Communes.

Élections Canada déposera un rapport au Parlement une fois que l’investigation sera bouclée.

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