À Colmar, le retable d’Issenheim fête ses 500 ans

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Publié 08/05/2012 par Gabriel Racle

Colmar, charmante ville de l’Alsace, mérite bien une visite cette année, non seulement parce qu’elle est au point de départ ou d’arrivée de plusieurs circuits des célèbres vignobles alsaciens… et de leurs caves, mais parce qu’en plus de son charme, elle célèbre en son musée un chef d’œuvre de l’art commencé il y a 500 ans: le retable d’Issenheim.

Il est bon de préciser d’abord ce que l’on entend par retables. Il s’agit d’œuvres artistiques religieuses, installées dans les églises, qui apparaissent au XIe siècle. On aurait alors modifié la position du célébrant qui faisait face au public durant les messes, pour le mettre de l’autre côté, le dos au peuple.

On aurait alors jugé bon de placer des décorations religieuses évocatrices de l’autre côté de l’autel, derrière celui-ci, retro tabula en latin, qui donne le mot français retable. Un retable comprend classiquement trois parties: un couronnement, une prédelle et une partie centrale. Le couronnement est la partie supérieure d’un retable; la prédelle en est la partie inférieure, peinte ou sculptée, divisée ou non en plusieurs panneaux; la partie centrale constitue la caisse ou huche.

La partie centrale peut être peinte ou sculptée et comporter un seul élément, c’est un monoptyque, deux panneaux de même taille, dans le cas d’un diptyque, ou plusieurs panneaux, s’il s’agit d’un polyptyque. Un retable comprenant un panneau central et deux volets fixes ou repliables est un triptyque.

Issenheim

Issenheim est un village situé à une vingtaine de kilomètres de Colmar qui, depuis les années 1300, possédait une commanderie de l’ordre religieux de Saint Antoine ou ordre des Antonins.

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Cet établissement est placé sous la responsabilité d’un commandeur, chargé de soigner les malades atteints d’une maladie courante au Moyen Âge, provoquée par un champignon parasite du seigle, l’ergot du seigle, qui servait de nourriture courante, et appelée maladie des ardents, feu sacré ou feu de Saint Antoine.

«Pour venir en aide aux malades, les Antonins leur servent du pain de bonne qualité et préparent le saint-vinage, un breuvage à base de vin dans lequel les religieux font macérer des plantes et font tremper des reliques de saint Antoine. Ils produisent également un baume à base de plantes aux vertus anti-inflammatoires.»

La commanderie s’enrichit, par des dons et des offrandes. La preuve en est donnée par les œuvres d’art que les commandeurs on fait réaliser: des sculptures en bois, saint Antoine, saint Jean-Baptiste, les stalles de l’église, le retable de sainte Catherine et saint Laurent, le «Retable d’Orlier», une commande de 1470, œuvre de Schongauer, peintre alsacien admiré par Michel-Ange.

Ce tryptique sera remplacé trente ans plus tard par le retable d’Issenheim, «chef d’œuvre de la peinture mondiale».

Le retable

À la suite de la commande faite par les Antonins, la construction du retable a commencé en 1512 et se prolongera jusque vers 1516, car ce retable était une œuvre complexe, comportant une partie peinte et une partie sculptée sur bois.

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Sa réalisation est donc l’œuvre conjointe d’un sculpteur alsacien, Nicolas de Haguenau, et d’un «peintre de génie», Maître Mathis, dont la biographie est lacunaire.

Ils créent un retable à transformation qui devait être une œuvre monumentale, mais qui a subi les avatars des démontages et déménagements pour des motifs historiques, et notamment les guerres et annexions. Le musée d’Unterlinden (Sous les tilleuls) à Colmar présente les éléments du retable, sans que celui-ci soit remonté, ce qui est impossible

À l’origine, le retable comprenait trois parties. Le retable fermé présentait une crucifixion centrale avec un volet fixe de chaque côté représentant Saint Sébastien et saint Antoine.

La prédelle figurait une mise au tombeau. La crucifixion s’ouvrait en deux pour présenter une deuxième composition, celle de l’illustration reproduite ici. Au centre, le concert des anges et la Nativité. À gauche, l’Annonciation et à droite la Résurrection. Ce deuxième plan était présenté à Noël, à Pâques et aux fêtes de Marie.

L’ouverture suivante offrait le retable ouvert pour la fête de saint Antoine. La caisse sculptée montre saint Antoine qui trône entre saint Augustin et saint Jérôme. Les panneaux latéraux peints traitent d’épisodes de la vie du saint. La prédelle montre le sauveur du monde et ses saints.

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En savoir plus

L’auteur de ces peintures, Mathis Grünewald, dont on a comparé le génie à celui de Dürer ou de Léonard de Vinci, ses contemporains, reste énigmatique. Ce serait peut-être un nom artificiel forgé tardivement. Mais son œuvre est bien réelle et, pou apprécier ce rare et incontestable chef-d’œuvre, rien de vaut une visite sur place.

Le Musée d’Unterlinden – qui présente d’autres trésors – publie une brochure, Unterlinden, le retable d’Issenheim, qui en 40 pages et de nombreuses illustrations – comme celle de cet article – donne des détails sur l’œuvre, son histoire, ses différents panneaux et son auteur.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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