Justin Trudeau veut incarner les valeurs canadiennes centristes

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Publié 03/10/2012 par Joan Bryden (La Presse Canadienne)

à 23h20 HAE, le 2 octobre 2012.

MONTRÉAL – Justin Trudeau a confirmé mardi soir qu’il sera candidat à la direction du Parti libéral du Canada, et manifesté son désir de redonner un second souffle à une formation politique qui, a-t-il affirmé, s’est éloignée des Canadiens de classe moyenne.

Il en a d’abord fait l’annonce dans une vidéo diffusée sur Internet, quelques instants avant un rassemblement réunissant quelques centaines de partisans dans sa circonscription de Papineau, dans la région de Montréal.

Le fils aîné de l’ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau veut ainsi démontrer sa capacité de rallier les troupes et créer un engouement médiatique. Il veut également faire mentir les rumeurs voulant qu’il ne soit qu’un visage au nom célèbre.

Les partisans présents ont applaudi lorsque le député âgé de 40 ans a confirmé ses ambitions à la chefferie, qui étaient sans doute l’un des secrets politiques les moins bien gardés du pays.

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«Mes chers amis, j’aime Montréal. J’aime le Québec. Et je suis en amour avec le Canada. Je veux mettre ma vie à son service. C’est pourquoi j’annonce ici, chez moi, ma candidature au poste de chef du Parti libéral du Canada.»

M. Trudeau a aussi indiqué qu’il voulait reconnecter le Parti libéral avec les gens ordinaires qui lui ont donné vie.

«J’ai trop souvent entendu, dans les cercles libéraux, que le Parti libéral a créé le Canada. Ceci, mes amis, est erroné, a-t-il dit. Le Parti libéral n’a pas créé le Canada. Le Canada a créé le Parti libéral. Les Canadiens ont créé le Parti libéral.»

«Nous avons eu du succès en tant que parti quand nous avons été proches des gens ouverts à leurs idées et prêts à travailler avec eux pour les réaliser.

«S’il y a une leçon à tirer de l’histoire du parti, elle n’est pas tant dans les politiques que nous avons instaurées que dans la façon dont nous sommes arrivés à les concevoir. Nous étions à l’écoute des Canadiens. Nous partagions leurs valeurs, leurs rêves, et nous avions fait de leurs combats les nôtres.

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«Et bien l’heure est venue d’écrire une nouvelle page de l’histoire du Parti libéral», a-t-il aussi déclaré.

Clase moyenne

La restauration de la sécurité économique de la classe moyenne est par ailleurs son principal cheval de bataille.

Mais alors que les classes moyennes de la Chine, de l’Inde, de la Corée du Sud et du Brésil profitent d’une prospérité accrue, les Canadiens vivent plutôt le contraire, a-t-il poursuivi, en parlant de niveaux de revenus plafonnés, de hausse des coûts et d’un fort accroissement de l’endettement personnel.

«Quelle est la réponse du Nouveau Parti démocratique? Semer les graines de la dissension régionale et blâmer les entreprises à succès. La réponse conservatrice? Privilégier un secteur par rapport à d’autres et promettre que la richesse se diffusera vers le bas, éventuellement.»

«Ce sont de belles réponses idéologiques à des questions difficiles et complexes. Mais leur seul point en commun c’est qu’elles sont toutes deux, de façon égale, erronées», a-t-il lancé.

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Francophones

Il s’est adressé aux Canadiens de langue française, promettant un parti qui «fait la promotion et embrasse la réalité francophone de ce pays».

«Je veux que le Parti libéral devienne de nouveau le parti qui valorise les communautés francophones à travers le pays et les appuie dans leur développement. Le porte-étendard du peuple français en Amérique», a-t-il lancé, suscitant les applaudissements nourris de ses supporters.

M. Trudeau a confié qu’il avait choisi la journée de mardi pour annoncer sa décision parce qu’elle aurait coincidé avec le 37e anniversaire de naissance de son regretté frère Michel, un skieur qui a perdu la vie dans une avalanche en 1998.

«Tous les jours, je pense à lui et je me répète de ne jamais rien tenir pour acquis», a déclaré M. Trudeau, en français. «Qu’il faut vivre pleinement sa vie. Et qu’il faut toujours rester fidèle à soi-même.»

Son plan de campagne est déjà prêt, alors qu’il doit se rendre à Richmond, en Colombie-Britannique, dès le lendemain du lancement et ensuite à Mississauga, en Ontario, jeudi, pour un rassemblement organisé par les anciens députés Navdeep Bains et Omar Alghabra. Vendredi, il doit se rendre au Nouveau-Brunswick, et plus particulièrement dans la circonscription de Beauséjour, où le député Dominic LeBlanc, l’un de ses bons amis, devrait lui manifester son soutien.

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Vedette

Enseignant avant de faire le saut en politique en 2008, Justin Trudeau a refusé l’offre qui l’incitait à se présenter dans la circonscription d’Outremont, qui était alors considérée comme un bastion libéral. Il a préféré se présenter dans Papineau, une des plus pauvres circonscriptions du pays, qui compte une forte population d’allophones. Ce siège a notamment été détenu par les anciens ministres libéraux André Ouellet et Pierre Pettigrew.

Aux élections de 2008, il a battu la députée bloquiste sortante, Vivian Barbot, et a résisté à la vague néo-démocrate qui a balayé le Québec en 2011.

Chez les libéraux, il est une vedette incontestée; il est celui qui amasse le plus d’argent lors des campagnes de financement.

Ce statut a été confirmé par la présence de plusieurs anciens députés libéraux — Don Boudria, Navdeep Bains, Pablo Rodriguez, Eleni Bakopanos — et au moins un député actuel — Massimo Pacetti.

Bien que les visages d’anciens ministres de l’époque de Pierre Elliot Trudeau — Marc Lalonde, André Ouellet et Lucie Pépin — ont également fait acte de présence, M. Trudeau n’a fait qu’une brève référence à son père lors de son discours. Il a d’ailleurs insisté sur le fait que sa campagne «portera sur le futur, et non le passé».

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Interrogé par les reporters, André Ouellet croit que Justin Trudeau «apprendra son métier sur le terrain» et deviendra un «atout de qualité» pour le parti. Selon M. Ouellet, il est important que M. Trudeau ait déjà un siège à la Chambre des communes, contrairement à d’autres candidats potentiels.

Et M. Ouellet n’a pu éviter la question des comparaisons entre le père et le fils.

«Bien sûr, son père était un grand, grand intellectuel. Mais je pense que Justin est lui aussi un orateur de talent», a déclaré M. Ouellet, ajoutant que le fils tenait à respecter l’objectif du paternel de créer une «société juste» et qu’il partageait le panache de son père.

Marc Lalonde croit que Justin Trudeau vise le bien commun, comme son père, mais que leurs personnalités sont très différentes.

«Vous le regardez, il est jeune, il paraît bien, il a du talent, un beau sourire, il est près des gens», a-t-il noté.

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«Bien que son père était un extraordinaire orateur… il n’était pas très chaleureux lors de contacts individuels. Il était très réservé, même plutôt gêné en privé. Alors que Justin, au contraire, est beaucoup plus exubérant.»

Gravitas

Les idées de M. Trudeau restent toutefois inconnues à bien des égards. Dans les diverses dossiers dont il s’est occupé dans l’opposition — la jeunesse, le sport amateur et l’immigration — il a eu peu à dire sur les grandes questions de l’heure et pratiquement rien à propos de l’économie.

Le choix de ses conseillers en campagne porte cependant à croire qu’il est au courant de son besoin de faire preuve de plus de profondeur et de substance.

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