Immigration: des mesures restrictives qui inquiètent les francophones

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Publié 08/05/2012 par Nourhane Bouznif

Le projet de loi C-31 relatif à l’immigration vient d’être adopté en deuxième lecture à la Chambre des Communes. Si elle entrait en vigueur, cette loi engendrerait de nombreux changements pour les demandeurs d’asile et permettrait au Canada d’expulser des réfugiés ayant obtenu un statut de résident.

Élaboré par les conservateurs, le projet de loi C-31 a été présenté à Ottawa comme permettant de réduire les délais de traitement des dossiers des demandes d’asile et d’empêcher les abus du système d’aide sociale du pays.

Soucieux d’informer les immigrants, le Centre francophone organisait samedi au YMCA de la rue Grosvenor un forum, pour présenter les points importants du projet de loi.

La conférence était animée par Aissa Nauthoo et Azadeh Tamjeedi, avocates et notaires, Zoë Zeng, stagiaire en droit et Christophe K. Mutonji, travailleur juridique communautaire. En parallèle de ce projet de loi, la Loi C-11, loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés (LMRER), entrera en vigueur dès le 29 juin.

Une liste de pays sûrs

Le gouvernement établira une liste de pays d’origine désignés comme étant sûrs (POD) et ne présentant pas un risque pour la population locale. Selon la Loi C-11, cette liste de POD sera élaborée par des experts.

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La Loi C-31 permettrait au ministre d’établir lui-même cette liste. Le risque étant que la désignation des pays sûrs se fasse en fonction d’intérêts politiques ou diplomatiques plus que pour les conditions de vie, et que cela porte préjudice à certains demandeurs d’asile. Autre mesure de ce projet de loi C-31, les délais d’audience pour les demandeurs d’asile se verraient raccourcis, passant de 18 mois à 30 à 60 jours selon les cas.

De même, les immigrants auraient 15 jours pour fournir une demande d’asile par écrit. Si le gouvernement y voit un moyen d’accélérer la procédure, pour Aissa Nauthoo ces délais sont trop courts pour permettre aux immigrants de constituer un dossier solide et de recueillir les documents demandés par les autorités.

Le projet de loi induit également de nombreuses interdictions pour les demandeurs d’asile: suppression du droit d’appel à la Section d’appel des réfugiés pour ceux qui proviennent des pays d’origine désignés, interdiction d’un an pour les demandeurs d’asile déboutés de présenter une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et de présenter une nouvelle demande d’examen des risques avant renvoi, refus des permis de travail des demandeurs d’asile de POD.

Également prévu par le projet de loi, les personnes demandant le statut de réfugié soupçonnées d’être arrivées de manière irrégulière pourront être placées en détention pour un an, sans contrôle judiciaire.

Dans le bulletin électronique du mois de mai de l’Association canadienne des libertés civiles, l’avocate Nathalie Des Rosiers dénonce une «situation dangereuse» en expliquant que «l’étiquetage d’un groupe n’est pas correct» et créera des injustices.

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Des groupes de défense des droits de l’homme ou de défense des sans-papiers, comme le collectif torontois No one is illegal, dénoncent ce projet de loi et le jugent illégal et anticonstitutionnel.

Épée de Damoclès

Un article inquiète particulièrement les opposants au projet de loi: selon l’article 19, des réfugiés ayant obtenu la résidence permanente pourraient être déchus de leur statut par décision du gouvernement, s’il estime que les conditions de vie dans le pays d’origine de la personne se sont améliorées.

Des milliers de résidents pourraient ainsi se voir expulser du Canada. Une manifestation contre le projet de loi était d’ailleurs organisée mardi dernier dans le centre-ville de Toronto.

Le projet de loi C-31 a été adopté en deuxième lecture à la Chambre des Communes le 23 avril, après cinq jours de débat. Il est actuellement examiné par le Comité sur l’immigration.

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