Justin Trudeau célébrait la semaine dernière le premier anniversaire de son élection à la tête d’un gouvernement majoritaire. Selon divers sondages, la lune de miel avec les Canadiens se poursuit: si des élections avaient lieu aujourd’hui, les gens qui voteraient pour lui seraient encore plus nombreux et les Libéraux récolteraient encore plus de sièges au Parlement.
Il est vrai que les Conservateurs et les Néo-Démocrates n’ont que des chefs intérimaires. Une demi-douzaine de députés sont déjà en lice pour remplacer Rona Ambrose dans sept mois. Au NPD, c’est encore le calme plat: on n’élira le successeur de Tom Mulcair que dans douze mois. Elizabeth May a failli quitter le Parti vert cet été. Personne ne se souvient qui dirige le Bloc québécois. Bref, l’opposition est faible.
Pire, un système électoral à choix hiérarchisés – le seul envisagé par les Libéraux pour remplacer notre système uninominal actuel – leur donnerait encore plus d’élus. Cette réforme ne serait d’ailleurs plus une priorité pour le gouvernement, qui a compris qu’elle divise les Canadiens et risque de l’entraîner en terrain miné, les Conservateurs réclamant un référendum et le NPD la proportionnelle pure.
Malgré la défaite du 19 octobre 2015, qu’on aime attribuer à la personnalité abrasive de Stephen Harper, les Conservateurs peuvent compter sur une base d’environ 30% des Canadiens. Ils sont souvent les seuls au Parlement à voter contre les projets libéraux, Justin Trudeau pouvant alors se targuer de parler au nom des deux tiers de la population. Pour renverser la vapeur ou imposer d’autres priorités, le prochain chef conservateur devra être un excellent communicateur, en plus d’être de son temps.
La popularité indéniable de notre premier ministre soleil, friand d’égoportraits dans les contextes les plus exotiques, contraste avec des perspectives économiques qui se sont assombries depuis un an. Pas catastrophiques, mais qui remettent en question la théorie des déficits censés stimuler la croissance, ainsi que la nouvelle définition élastique d’«infrastructures» couvrant presque tout ce que fait le gouvernement.