Corruption dans la construction au Québec: la juge invite le public à collaborer à son enquête

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Publié 21/02/2012 par Lia Lévesque (La Presse Canadienne)

à 15h52 HNE, le 21 février 2012.

MONTRÉAL – La juge France Charbonneau, qui préside la commission d’enquête sur l’industrie de la construction, invite les citoyens à contribuer aux travaux s’ils savent des choses, et les assure qu’ils peuvent avoir confiance.

La présidente de la commission d’enquête, qui était restée discrète à ce jour, vient de faire une première sortie pour s’adresser au public par le biais du site web de la commission, qui a été lancé par la même occasion.

Dans son message, la juge Charbonneau invite tous ceux qui détiennent des informations d’intérêt à communiquer avec la commission en toute confiance, soit par téléphone, soit par courriel. La commission assure que les informations données seront traitées en toute confidentialité.

«Il est essentiel que tous contribuent ouvertement, pleinement et sans restriction à nos travaux», affirme-t-elle.

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«Si vous avez des informations sur le fait que des soumissionnaires s’entendent pour fixer des prix à l’avance, pour se réserver des territoires, pour obtenir des contrats à tour de rôle, pour exclure quelqu’un d’un appel d’offres, ou si vous constatez qu’un élu ou un fonctionnaire reçoit une faveur ou un avantage d’une personne dans le domaine de la construction, ou si vous apprenez qu’un parti politique, provincial ou municipal, obtient du financement relié à l’octroi de contrats de construction, contactez-nous», a lancé la juge.

«En nous informant, vous vous aidez, vous nous aidez», a-t-elle ajouté.

Elle a également indiqué que les enquêteurs travaillent déjà activement au dossier en rencontrant des gens dans les ministères, les entreprises privées et les organismes du secteur de la construction.

«Ils rencontrent différents intervenants et recherchent les éléments de preuve qui établiraient des stratagèmes de collusion et de corruption. Ils scrutent également de possibles liens avec le financement des partis politiques. Enfin, ils enquêtent activement sur la possible infiltration du crime organisé dans l’industrie de la construction», a-t-elle soutenu.

Elle s’est dite aussi «très satisfaite de l’avancement des travaux à ce jour», bien que plusieurs aient manifesté de l’impatience.

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La juge a prévu faire une déclaration d’ouverture au cours du mois de mai puis, dans les jours suivants, son équipe entendra ceux qui veulent être reconnus comme partie intéressée ou intervenant. Elle a dit cependant ignorer encore à quel moment débutera l’audition des premiers témoins.

La Commission d’enquête sur l’octroi de contrats et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction a été créée par décret, l’automne dernier, sous la pression populaire. Le gouvernement Charest s’était refusé jusque-là à créer une telle commission, affirmant que les différentes mesures qu’il avait mises en place porteraient fruit et qu’il fallait faire preuve de patience.

La pression publique avait eu raison de lui et la commission d’enquête avait alors été créée, puis la juge France Charbonneau, de la Cour supérieure, nommée. Ensuite, le procureur chevronné Sylvain Lussier a été nommé procureur-chef de cette commission en novembre dernier.

Interrogé à ce sujet à Québec, le ministre des Transports, Pierre Moreau, a précisé qu’il avait donné instruction à son ministère de collaborer pleinement à la commission d’enquête, d’ouvrir les livres et de transmettre toute documentation requise. «J’ai demandé à l’administration du ministère de collaborer avec la Commission Charbonneau. Le ministère des Transports est le plus gros donneur d’ouvrage du gouvernement du Québec», a-t-il rappelé.

Il ignorait si son ministère demandera le statut de participant ou d’intervenant devant la commission.

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Le numéro de téléphone pour communiquer avec la commission est le 1-855-333-2342, sans frais. Pour communiquer par Internet, les gens peuvent s’adresser au [email protected]

Pomerleau étonné des scandales

Par ailleurs, le grand patron de la plus importante entreprise de construction au Québec, Pomerleau, s’est dit «étonné», mardi, des nombreuses affaires de collusion et de corruption révélées au cours des dernières années.

À l’issue d’un discours prononcé à la tribune de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Pierre Pomerleau a soutenu que la «très grande majorité» des 25 000 entrepreneurs en construction du Québec travaillent de façon «éthique».

Il a même lancé que l’encadrement et la réglementation de l’industrie étaient peut-être devenus «exagérés», avant d’ajouter: «mais c’est peut-être pour le mieux».

M. Pomerleau a en outre déploré le fait que le gouvernement, les sociétés d’État et les municipalités octroient généralement leurs contrats aux plus bas soumissionnaires. Il souhaiterait qu’on accorde plus d’importance aux aspects «qualitatifs» des dossiers, comme c’est le cas, d’après lui, en Ontario et ailleurs au pays.

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Le dirigeant s’est par ailleurs réjoui de l’adoption de la loi 33, qui mettra fin au placement syndical dans la construction. Il estime que cette mesure se traduira par des économies de coûts importantes pour les entreprises du secteur.

Enfin, Pierre Pomerleau a dit ne pas craindre que la commission Charbonneau ternisse davantage l’image de l’industrie. À ses yeux, l’exercice permettra de vider la question et de passer à autre chose.

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