Mugesera a été expulsé vers le Rwanda

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Publié 24/01/2012 par Sidhartha Banerjee (La Presse Canadienne)

à 15h50 HNE, le 24 janvier 2012.

MONTRÉAL – Le gouvernement canadien a finalement confirmé mardi la déportation la veille de Léon Mugesera vers son pays natal, le Rwanda, où il devrait faire face à des accusations en lien avec le génocide survenu en 1994.

Presque 24 heures après le décollage de l’avion qui transportait M. Mugesera, le ministre fédéral de l’Immigration, Jason Kenney, en a fait l’annonce mardi après-midi à Montréal.

Il a soutenu que le ressortissant rwandais avait abusé pendant 16 ans des outils mis à sa disposition afin qu’il puisse se défendre.

Le ministre Kenney a ajouté que toutes les vérifications avaient été faites pour s’assurer que M. Mugesera ne sera pas torturé par le régime rwandais. L’évaluation de ce risque avait retardé son expulsion.

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Le gouvernement du Rwanda avait affirmé lundi que l’homme avait quitté le Canada dans un vol en direction de Kigali, la capitale du pays d’Afrique de l’Est.

M. Mugesera devient le premier demandeur d’asile dans un pays occidental à être retourné au Rwanda pour y répondre à des accusations liées au génocide de 1994. Il était au Canada depuis près de 20 ans.

Les adieux se sont faits dans les sanglots, alors que huit de ses proches, dont son épouse, l’ont accompagné.

En Afrique toutefois, plusieurs se réjouissaient du fait que M. Mugesera serait enfin jugé pour ses crimes présumés.

«La nouvelle de la déportation de Léon Mugesera, même des décennies après, est bienvenue pour un peuple qui s’est engagé vers la guérison et la justice», pouvait-on lire sur le compte Twitter de la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo. «Le Canada a pris la bonne décision».

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Dans un autre message diffusé plus tard, la ministre a confirmé que M. Mugesera était en route vers le Rwanda. «Léon Mugesera est à bord d’un avion vers Kigali! Merci aux gens ordinaires du Canada qui ont vu clair dans la confusion de ce labyrinthe juridique et ont dit: «il doit partir».»

Il est soupçonné de crime contre l’humanité en lien avec le génocide rwandais et devrait faire face à la justice dans son pays d’origine. En 1992, alors qu’il oeuvrait dans le monde politique, il avait livré un violent discours anti-Tutsis, les qualifiant de «coquerelles» et demandant leur extermination, devant un millier de personnes.

Plus tôt lundi, l’étau s’était resserré sur le destin de M. Mugesera, alors qu’il a perdu deux batailles juridiques coup sur coup, ouvrant la porte à son expulsion.

Une autre requête de dernière minute pour tenter d’obtenir le droit de demeurer au Canada a échoué lundi matin, en Cour supérieure du Québec, ce qui n’a pas empêché ses avocats de déposer une requête semblable devant la Cour fédérale, qui l’a aussi refusé.

La Cour supérieure a rejeté la demande du Rwandais, qui réclamait un sursis pour éviter son renvoi dans son pays d’origine. Le juge Michel Delorme a expliqué qu’il n’avait pas la compétence nécessaire pour décréter une telle suspension de procédure.

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Accueilli au Canada en 1993, il luttait contre le gouvernement fédéral depuis 1995 pour obtenir le droit de demeurer au pays.

À l’aéroport Pierre-Elliot Trudeau de Montréal, un petit groupe de partisans de M. Mugesera s’était rassemblé. Ceux-ci ont quitté l’aéroport sans s’adresser aux médias présents.

Léon Mugesera, âgé de 59 ans, est accusé d’incitation au génocide. Son discours de 1992 est vu comme l’un des déclencheurs du massacre de plus de 800 000 Tutsis et des Hutus modérés en 100 jours, deux ans plus tard.

Léon Mugesera plaidait qu’il risquait fort d’être torturé et maltraité s’il était renvoyé au Rwanda. Plus tôt en janvier, le Comité contre la torture de l’Organisation des Nations Unies avait demandé en vain au Canada d’accorder un sursis à M. Mugesera, le temps d’étudier les risques auxquels il s’expose.

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