Une enquête criminelle devient une lecture savoureuse

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Publié 11/10/2011 par Paul-François Sylvestre

Auteur de quelque cinquante romans, tant pour adultes que pour la jeunesse, François Gravel vient de se lancer dans une nouvelle entreprise littéraire, celle d’une série d’enquêtes policières. Il a récemment publié À deux pas de chez elle. La première enquête de Chloé Perreault , aux Éditions Québec Amérique. Juste par le sous-titre, Gravel nous promet de remettre en scène la jeune sergent-détective à la Sûreté du Québec.


Chloé Perreault est appelée à résoudre une affaire qui traîne depuis trente-trois ans. En 1976, Marie-Thérèse Laganière disparaît à Rivière-du-Loup. En 2009, ses ossements sont retrouvés tout près de Milton (Québec), sa ville natale. Que s’est-il passé?


Qui aurait pu en vouloir à une jeune femme si appréciée et talentueuse? Qui est cet homme dont le squelette a été retrouvé avec celui de Marie-Thérèse? Tant de questions auxquelles Chloé Perreault trouvera des réponses en exactement une semaine, soit du 12 au 18 juillet 2009.


La jeune sergent-détective reprend avec acharnement les recherches amorcées dans les années 1970. Elle interroge à nouveau les témoins, s’élance sur quelques fausses pistes, s’arrête sur chaque fait en espérant trouver celui qui expliquera une mystérieuse disparition qui semble maintenant être devenue un meurtre ou un pacte suicidaire…


Maître de l’intrigue bien ficelée, François Gravel sait tenir ses lecteurs en haleine. Il aime jouer avec l’élastique de la tension ou nous faire marcher sur la corde raide. Cela ne l’empêche pas de glisser ici et là des remarques anodines. Il écrit, par exemple, que selon Benjamin Franklin, deux choses sont sûres: la mort et les impôts. Plus loin, on peut lire ceci: «Vaut mieux avoir un arbre devant chez soi qu’un Dalaï Lama dans son salon: il nous inspire autant de sagesse, et en plus il fait de l’ombre.»


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Comme la protagoniste est une jeune détective, l’auteur l’amène parfois à se rappeler une consigne d’un professeur de techniques policières: «Il faut toujours accorder la plus grande importance à ce que disent les témoins et encore plus à leur façon de le dire, mais ne jamais les croire sur parole.» Ce même prof disait aussi «qu’à chaque problème complexe existait une solution simple, qui se révélait la plupart du temps fausse».


La disparition de Marie-Thérèse a eu lieu dans les années 1970, période que Gravel décrit comme synonyme de liberté sexuelle et de drogues. Fumer un joint va de soi. Prendre un coup aussi. Il faut d’ailleurs noter qu’on boit beaucoup dans ce roman policier, car les gens ont souvent besoin de café ou d’un verre de vin «pour amorcer la machine à confidences – comme s’ils devaient d’abord s’exercer les lèvres avant de parler».


Un collègue de Marie-Thérèse croit que les gens finissent toujours par parler, par cracher le gros morceau quand ils en ont sur la conscience. Encore faut-il que la sergent-détective les mette en confiance. Et comme Chloé Perreault a le tempérament d’une marathonienne, elle part énergiquement, on l’oublie allègrement et, au fil d’arrivée, elle met évidemment un pied devant l’autre pour décrocher la médaille d’or.


Je me dois de vous signaler une figure de style très originale que l’auteur nous sert lorsqu’il explique comment l’un de ses personnages a tenté par tous les moyens de retrouver son épouse et sa fille. Il écrit: «J’aurais été prêt à marcher à genoux de Sainte-Anne-de-Beaupré jusqu’à l’oratoire Saint-Joseph pour y arriver.» Superbe et typiquement québécois!


Ce roman de François Gravel renferme plus d’une référence au comportement homosexuel. Il n’y a jamais trace d’homophobie. C’est plutôt le contraire. Il note qu’un jeune homme était un ami parfait, «comme savent l’être les homosexuels: gentil, prévenant, cultivé, raffiné, pas menaçant…»


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Je ne vous dévoilerai évidemment pas le dénouement de cette intrigue policière. Qu’il suffise de savoir que «Marie-Thérèse, sous ses allures de jeune fille pure aux grands yeux naïfs, était peut-être un monstre d’égocentrisme, une experte en manipulation, sans une once de compassion».


Je vous avouerai, en revanche, que François Gravel a su faire de cette première enquête criminelle de Chloé Perreault un savoureux moment de lecture. Il est fort à parier que Chloé reprendra du service dans un avenir rapproché. À suivre!


François Gravel, À deux pas de chez elle. La première enquête de Chloé Perreault, roman, Montréal, Éditions Québec Amérique, coll. Tous continents, 2011, 336 pages, 24,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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