L’orthographe des élections

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Publié 03/05/2011 par Martin Francoeur

Depuis un peu plus d’un mois, le pays est en mode électoral. Les chefs des grands partis sillonnent le pays, les sondages se succèdent, les controverses éclatent, les débats s’animent. Tout ça pour préparer le grand jour, celui du scrutin. L’enjeu est important: chacun des chefs souhaite former le prochain gouvernement.

Au cours des dernières semaines, des collègues m’ont interpellé plus d’une fois sur certaines curiosités ou difficultés linguistiques, orthographiques ou typographiques en lien avec les élections fédérales. J’ai pensé réunir quelques-uns de ces sujets, histoire de fermer le grand livre électoral jusqu’au prochain déclenchement d’élections…

Dans un premier temps, il y a un mot de vocabulaire que les médias tentent tant bien que mal d’imposer. Il s’agit du mot «circonscription», que l’on remplace souvent – à tort – par le mot «comté». Les comtés sont d’anciennes divisions administratives. Le terme «circonscription» est plus juste pour désigner le territoire représenté par un député.

Au Canada, on compte 308 circonscriptions électorales. Certaines d’entre elles ont des noms complexes, qui posent un joli problème typographique. Avouons d’entrée de jeu que des circonscriptions comme «Barrie», «Durham», «Brant», «Repentigny», «Guelph», «Kenora», «Oshawa» ou «Thornhill» ne posent aucune difficulté. Ce sont des noms simples. Mais une majorité de circonscriptions ont un nom composé, comme «Simcoe-Grey», «Windsor-Tecumseh», «York-Centre» ou «Ottawa-Vanier». Jusqu’ici, pas de problème non plus.

Mais certains noms de circonscription sont formés de plus de deux éléments, dont certains sont déjà unis par un trait d’union. C’est surtout vrai pour les noms francophones des circonscriptions du Québec.

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Une circonscription comme «Berthier-Maskinongé» prendra un simple trait d’union. Mais celle de «Saint-Maurice-Champlain» est formée de Saint-Maurice et de Champlain. La solution retenue par certains sites web ou certaines institutions est de mettre un double trait d’union: «Saint-Maurice–Champlain». Ça vaut aussi pour les noms anglais: «Mississauga East-Cooksville», par exemple.

Personnellement, je trouve que ce n’est pas la bonne façon de faire. J’opterais plutôt pour le tiret demi-cadratin – une sorte de trait d’union allongé – comme celui utilisé pour l’incise qui précède. On écrirait donc: «Bas-Richelieu-Nicolet-Bécancour» pour bien isoler chacun des trois éléments, mais en conservant le trait d’union simple dans «Bas-Richelieu».

On rencontre cette construction typographique sur les documents qui indiquent les dénominations des circonscriptions sur le site web d’Élections Canada. L’autre difficulté qui se pose, dans les noms de circonscriptions, c’est l’hésitation quant à la traduction. Doit-on dire, en français, «Kingston-et-les-Îles» ou «Kingston and the Islands»?

C’est une question sans réponse. Élections Canada traduit certains noms de circonscriptions, comme «Kingston et les Îles», qu’ils écrivent d’ailleurs sans trait d’union, ou encore «Calgary-Centre-Nord». Mais d’autres noms sont laissés sous leur forme anglaise: «West Vancouver–Sunshine Coast–Sea to Sky Country». D’autres sont des hybrides, comme «Colombie-Britannique–Southern Interior». On a traduit le nom de la province, mais pas le nom de la région «Southern Interior».

Bref, il faut souvent se référer aux dénominations officielles préconisées par Élections Canada.

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Puisqu’il est question de «West Vancouver–Sunshine Coast–Sea to Sky Country», on notera qu’il s’agit d’une des circonscriptions ayant un très long nom. Un peu comme «Cumberland–Colchester–Musquodoboit Valley», «Abitibi–Baie James–Nunavik–Eeyou», «Lanark–Frontenac–Lennox and Addington» ou encore «Montmagny–L’Islet–Kamouraska–Rivière-du-Loup». Dans des textes ou des descriptions de soirées électorales, ça peut devenir fastidieux.

L’autre grande question linguistique en période électorale concerne les majuscules dans les noms des partis. On retiendra que la règle générale veut qu’on mette une majuscule uniquement au mot «parti».

On écrira donc «le Parti conservateur du Canada», le «Parti libéral» ou le «Bloc québécois». Dans le cas du «Nouveau Parti démocratique», on met aussi une majuscule à «Nouveau» puisque c’est un adjectif qui précède le générique «Parti».

On peut aussi parler des «conservateurs», des «libéraux», des «néo-démocrates», des «bloquistes» ou des «verts», toujours sans majuscule.

J’ai eu droit à quelques autres interrogations, mais je vous en ferai grâce. Ne sommes-nous pas tous un peu las d’entendre parler d’élections? Je vous fais une promesse – et elle n’est pas électorale – avant de mettre un point final à cette chronique: je ne reparlerai pas d’élections avant… la prochaine élection!

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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