Henri Mitterand est un érudit dont le domaine de prédilection est l’analyse littéraire des oeuvres du 19e siècle. Il a publié, dans une édition critique, la série complète des Zola, tout en continuant à écrire sur l’auteur des Rougon-Macquart de nombreux articles et ouvrages, dont trois magnifiques tomes de recherches*. Mitterand est infatigable; il nous régalait l’an dernier des savoureuses chroniques de Maupassant, dont L’Expressa rendu compte. Cette année, Mitterand revient d’abord à Zola avec L’Affaire Dreyfus**
On y trouvera, au centre du débat, la célèbre lettre de Zola, révolté, au Président de la République, J’accuse. La diatribe n’est pas sans longueur, mais elle atteint son but en nommant explicitement tous les responsables du sinistre complot antisémite de l’Armée et de l’Église
Le journal L’Aurore tire la lettre à 300 000 exemplaires et son impact va secouer toute la nation. Mitterand, avec sa clarté habituelle et son talent littéraire, relate, à la manière d’une enquête policière, tous les aspects d’une épouvantable falsification des faits, un document fabriqué par le commandant Esterhazy pour faire croire à une trahison de secret militaire par le capitaine Dreyfus.
Ce dernier sera dégradé et condamné au bagne, où il séjournera plusieurs années dans des conditions atroces, jusqu’à sa réhabilitation, due à l’énergie de Zola. Lui-même, condamné par un procès en diffamation, devra s’exiler.
Mitterand a réuni, dans ce livre de poche, tous les documents passionnés qui entourent «l’affaire», dont les textes de La Vérité en marche, et tous ceux des indignés qui ont défendu Dreyfus et soutenu Zola, dans une bataille incessante. On trouve aussi de bien belles lettres d’amour dans la correspondance entre Zola exilé en Angleterre et son épouse restée en France.