Slague, l’histoire d’un mineur au TfT

Que de remords...

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Publié 13/04/2010 par Guillaume Garcia

Un père, alcoolique, se retourne sur sa vie et enrage devant le tableau cruel qu’il contemple. Sa femme l’a quitté, son fils est mort dans la mine et lui se promène en chaise roulante, une bouteille de fort à la main. Slague, l’histoire d’un mineur met en scène un personnage unique qui nous fait partager le fil de ses pensées durant un peu plus d’une heure. Jean-Marc Dalpé, traducteur et comédien de la pièce réussit là un très beau tour de force.

«Je suis un ver de terre intelligent». C’est ainsi que commence la pièce. Par cette métaphore qui reviendra tout au long de la performance, l’homme mineur, miné, exprime son amertume sur sa condition.

«J’avale de la terre, je chie de l’or». Le travail est dur mais il rapporte, alors pourquoi priver la famille de ce revenu conséquent? Allez hop mon fils, à la mine. Pierre Delorimier a tout appris à son fils. Comment gagner du temps, parce que le temps c’est de l’argent. Chaque seconde de gagnée, c’est du bonus à la fin de la semaine. La leçon de toute une vie, le savoir transmis, vendredi c’est pay-check.

Alors un beau jour, le ver de terre intelligent commet une erreur irréparable et en veut à toute la société. La compagnie n’y est peut-être pas pour rien mais l’homme y est certainement pour beaucoup aussi. L’histoire est poignante et magnifiquement interprétée par Jean-Marc Dalpé.

Lorsqu’il a découvert la pièce de l’écrivain anglophone Mansel Robinson, l’auteur-comédien-traducteur a tout de suite voulu jouer ce personnage de père rongé par les remords, cassé par la vie et noyant dans la boisson le goût amer de son passé.

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Sur la scène du TfT, où s’entremêlent casque, lampe et autres objets témoignant de l’univers minier, Jean-Marc Dalpé trône, seul, enfoncé dans le siège du fauteuil roulant d’un ver de terre intelligent, mais infirme.

L’objectif de faire tenir en haleine et pendant plus d’une heure le public est atteint et de quelle manière! Parfois drôle, souvent aigri, le ton de la voix du comédien est d’une redoutable efficacité quant il s’agit de faire passer des émotions.

Forcément, devant l’histoire dramatique racontée par le comédien, le public est tout acquis à la cause défendue par Pierre Delorimier. Les patrons sont des exploiteurs, qui vivent sur le dos des travailleurs de l’ombre. Ils magouillent, ils brouillent les pistes, détournent des fonds et trafiquent les rapports financiers. Son fils est mort dans la mine, et l’action perd de la valeur quand il faut stopper toute activité pour venir chercher le corps. Triste réalité, mais ô combien plausible.

L’infirme ver de terre intelligent en vient à raconter son histoire à son ami journaliste, son accident, la mort de son fils, mais celui-ci lui envoie en travers de la figure que son histoire est banale et inutile à faire connaître, la compassion est à son comble.

Le journaliste n’a pas peut-être pas si tord que ça. L’homme est souvent prêt à tout pour de l’argent et tous les jours des gens se blessent ou meurent aux quatre coins du globe en travaillant, parfois ce ne sont encore que des enfants, ou des fils qu’on aime.

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Le chemin de la rédemption sera long et sinueux pour Pierre Delorimier avant de pouvoir faire face à la vérité crue et auto-destructrice.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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