L’esprit olympique et linguistique

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Publié 02/03/2010 par Martin Francoeur

J’aime les Jeux olympiques. Et quoi qu’on dise sur l’organisation de ceux de Vancouver, sur le climat boudeur ou sur les ratés observés lors des compétitions, les Jeux m’ont procuré de grands instants de bonheur.

Il faut dire que les 21e Jeux d’hiver ont bien mal commencé. La mort tragique du lugeur géorgien Nodar Kumaritashvili a semé la consternation sur les Jeux, avant même que la cérémonie d’ouverture en donne le coup d’envoi officiel.

Les images de cet athlète du Caucase heurtant de plein fouet une des poutres longeant la piste de luge avaient de quoi glacer le sang.

J’ai toujours été fasciné par certains sports d’hiver originaux, comme la luge, le bobsleigh et le skeleton. Les athlètes atteignent des vitesses étonnantes sur des engins de plus en plus performants.

On n’a pas souvent la chance de voir ces athlètes à l’oeuvre. Les réseaux de télévision n’ont pas l’habitude de nous présenter une tranche de la coupe du monde de bobsleigh comme ils nous présentent des joutes de hockey, des compétitions de patinage artistique, voire des grands championnats de curling.

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Je n’ai pas la prétention d’être un expert des techniques du skeleton, de la luge ou du bobsleigh, mais sur le plan linguistique, j’ai déjà fouillé ces trois sujets fascinants.

On pourrait croire que le skeleton est relativement nouveau aux Jeux olympiques d’hiver. En fait, la discipline a beau être réapparue comme sport olympique en 2002 à Salt Lake City, il faut savoir qu’elle était au programme des jeux de Saint-Moritz en 1928 et en 1948.

On dit d’ailleurs que Saint-Moritz, en Suisse, est la patrie du skeleton tel qu’on le connaît aujourd’hui.

Sur le plan linguistique, «skeleton» est avant tout le mot anglais pour «squelette». Le terme «skeleton» est aussi présent dans le vocabulaire de la construction, de la géologie, de l’édition et de l’aéronautique.

Son emploi pour désigner un équipement sportif et la discipline qui en découle est plus complexe.

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L’origine du mot en tant que tel demeure floue. Certains ouvrages disent qu’il s’agit simplement d’une forme dérivée de l’allemand «schlitten», qui signifie «traîneau».

Mais le site Internet du Comité international olympique nous dit que la discipline a pris ce nom en 1892, lorsqu’un nouveau type de luge réalisée essentiellement en métal a été introduite. Les gens trouvaient qu’elle avait la forme d’un squelette, d’où le nom de «skeleton».

Le skeleton fait partie de ces disciplines qu’on appelle «sports d’engins». Comme le ski ou le patinage, les sports d’engins ont pour origine des modes de locomotion utilitaires.

Dès le moyen âge, en Europe occidentale, on utilise des «schlittes» à deux patins. Les bûcherons, particulièrement, ont adopté ce mode de transport pour le bois ou le foin, sur des réseaux de traverses aménagés. Le patin apparaissait alors plus efficace que la roue, en raison de la configuration géographique des terrains.

La luge est un autre sport d’engin qui jouit d’une grande popularité. À la différence des «schlittes» médiévales, elles n’avaient, à la même époque, qu’une vocation utilitaire.

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La luge était déjà employée à des fins ludiques. Le mot, à proprement parler, aurait des origines franco-provençales, suisses romandes et savoyardes.

Ce n’est cependant que vers 1537 qu’il a été utilisé dans le sens de «petit traîneau pour glisser sur la neige».

Ça fait presque un demi-millénaire! La luge, en tant que discipline olympique, a fait son entrée aux Jeux olympiques d’Innsbruck en 1964.

Le bobsleigh, quant à lui, était inscrit au programme des tous premiers jeux d’hiver, en 1924 à Chamonix. Le bobsleigh a des origines nord-américaines.

Il aurait une évidente parenté avec le toboggan, d’origine amérindienne. Le bobsleigh existait déjà aux États-Unis en 1839. L’engin était utilisé en montagne, pour transporter des charges de bois, notamment.

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Sur le plan linguistique, le terme «bobsleigh» est directement emprunté à l’anglais. Il est formé de «to bob», qui signifie «se balancer», et «sleigh», qui veut dire «traîneau».

Les mots «bobsleigh», «luge» et «skeleton» désignent à la fois la discipline et l’engin qui est utilisé pour y participer.

Et si les termes «bobeur» et «lugeur» sont officiellement reconnus pour désigner un athlète qui pratique le bobsleigh et la luge, il en est autrement pour le skeleton. On parle encore, vaguement, de «spécialiste du skeleton» ou d’«athlète en skeleton».

Si la discipline gagne en reconnaissance et en popularité, alors on verra sans doute apparaître un terme générique pour désigner la personne qui pratique le skeleton.

Un peu comme on a des patineurs, des lugeurs, de bobeurs, des hockeyeurs, des skieurs et des curleurs, on pourrait avoir apparaître des «skeletoneurs»…

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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