Le gouvernement Harper estime qu’il ne devrait pas y avoir de période d’attente avant de permettre à un ministre de poser sa candidature à une nomination à la magistrature. C’est du moins ce qu’on peut déduire de la nomination à un poste de juge, le 20 mai 2009, de celui qui, cinq jours auparavant, était le vice-premier ministre de l’Alberta. Ron Stevens a nécessairement déposé sa candidature alors qu’il était encore en politique. Toutefois, le principal intéressé fait présentement, malgré lui, la démonstration qu’une période d’attente de 90 jours ne serait pas suffisante.
Comme l’atteste la photo ci-contre, les consommateurs qui fréquentent le Centre d’achats Glenmore Landing, à Calgary, peuvent constater que le député fédéral et le député provincial de l’arrondissement y ont leur bureau de circonscription électorale. Stephen Harper est encore en politique. Est-ce aussi le cas de Ron Stevens?
Lorsqu’il a démissionné de son poste de député provincial de Calgary-Glenmore le 15 mai dernier, Ron Stevens savait que la nomination d’un politicien à un poste de juge est un sujet délicat. Plus de trois mois plus tôt, au chroniqueur Don Braid qui lui demandait s’il allait quitter la politique pour être nommé juge de la Cour du banc de la Reine, Ron Stevens avait ainsi répondu pour esquiver la question : «I think you’ve been visiting too many bars, Don». (Calgary Herald, 11 février 2009).
Puisqu’il avait été ministre de la Justice et procureur général, Ron Stevens n’était pas sans connaître la position de l’Association du Barreau canadien (ABC) selon laquelle, pour éviter toute apparence de favoritisme politique, aucun ministre ne devrait être nommé directement à la magistrature, sauf après une période intermédiaire de deux ans suivant la date de sa démission du cabinet. C’est sans doute pour cela qu’au moment où sa démission a été rendu publique, il a refusé d’indiquer ce qui allait être sa nouvelle carrière.
Les commentateurs sont unanimes à dire que toutes les activités et relations politiques de nature partisane doivent cesser totalement et sans aucune équivoque dès l’entrée en fonction d’un juge car l’impartialité, réelle et apparente, est une condition essentielle de l’exercice de la fonction judiciaire.