2009, l’année Darwin

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Publié 30/06/2009 par Gabriel Racle

Il y a 200 ans, le 12 février 1809, naissait à Scherewsbury, en Angleterre, dans une famille scientifique – son père était médecin et son grand-père naturaliste – Charles Darwin, qui allait révolutionner l’histoire de la vie avec la publication, il y a 150 ans, de son livre De l’origine des espèces, et susciter des recherches scientifiques toujours en cours et des débats qui perdurent encore.

Cette année Darwin est donc l’occasion de mieux connaître ce scientifique, alors que se manifeste un regain d’intérêt pour ses théories, et que reprennent vigueur les oppositions du créationnisme.

De nombreux livres, publiés à cette occasion et de niveaux scientifiques diversifiés, peuvent y contribuer, chacun pouvant trouver celui qui lui convient pour s’informer sur un sujet aussi capital.

Appliquant peut-être l’adage voulant qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même, Darwin nous a laissé sa biographie rédigée vers ses 70 ans. Charles Darwin, L’Autobiographie, Seuil, 248 p. est un agréable petit livre, fort bien présenté et d’une lecture facile, dans lequel l’auteur décrit les différentes étapes de sa vie, de sa naissance à son mariage et à sa dernière résidence anglaise, avec une surprenante «Évaluation de mes capacités intellectuelles».

Jeune esprit scientifique

Très jeune, il fait preuve d’un esprit scientifique, collectionne les insectes, les coquillages, les minéraux, fait des expériences de chimie avec son frère. Son père veut faire de lui un médecin. Mais les cours de l’université d’Édinbourg étaient «interminablement ennuyeux», sauf ceux de chimie.

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À la suggestion de son père, il abandonne la médecine pour la théologie pour devenir pasteur. Cambridge ne lui réussit pas mieux et il passe à la géologie.

Une place sur le Beagle

C’est alors que survient le grand événement de sa vie. En 1831, il obtient une place sur le Beagle, un bateau qui va cartographier les côtes sud de l’Amérique. Il accompagnera le capitaine dans un voyage de cinq ans.

Darwin étudie la géologie des îles et des continents abordés, collectionne des spécimens et des fossiles des espèces qu’il rencontre. Il fait des observations stimulantes.

Ainsi, en 1832, en Uruguay, il note à partir de fossiles de grands tatous que l’espèce a diminué de taille. Dans les îles Galápagos, en 1835, il fait d’autres observations du même genre, qui le conduisent à élaborer sa théorie sur l’évolution des espèces. Il remarque qu’une même espèce de pinons, retrouvée dans plusieurs îles, montre des différences notables: suivant le lieu, leur bec s’est adapté à différentes sortes de nourritures. Un bel exemple d’évolution.

1858 et 1859

Le 2 octobre 1836, Charles Darwin rentre en Angleterre. Il commence alors son travail de réflexion en étudiant, rapprochant, comparant les spécimens rapportés et il échafaude sa conception de l’évolution. D’autres scientifiques remettent aussi en cause les théories officielles: le catastrophisme et le fixisme.

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Le géologue Charles Lyell montre que la Terre a plus de 6000 ans (donnée biblique), Jean-Baptiste Lamarck parle d’évolution des espèces par adaptation au milieu, comme le cou de la girafe qui s’allonge. Le 1er juillet 1858, à la Linnean Society, Darwin expose avec le naturaliste Alfred Wallace, arrivé à des conclusions semblables en Indonésie, la théorie de l’évolution des espèces. 

Le 24 novembre 1859, il publie L’Origine des espèces par le moyen de la sélection naturelle, ou la préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie.

Darwin explique que les espèces descendent d’ancêtres communs et ont évolué selon la sélection naturelle, du fait que la nature choisit les plus aptes à survivre dans leur environnement, pour améliorer les espèces.

Ce processus naturel détermine l’évolution de chaque espèce, car les caractéristiques favorisant sa survie sont transmises de génération en génération.

«La théorie de l’évolution au sens darwinien du terme est actuellement le meilleur cadre conceptuel que nous ayons à notre disposition pour comprendre rationnellement l’instabilité du vivant, pour penser un monde naturel essentiellement dynamique», commente Hervé Le Guyader, directeur du laboratoire «Systématique, adaptation, évolution» du CNRS.

Ennemis puissants

Certes, mais à l’époque, la théorie darwinienne suscite des réactions enflammées. Le 30 juin 1860, quelques mois après sa publication retentissante, L’Origine des espèces doit être soumise à la critique de l’Église anglicane et de l’Académie des sciences, toutes deux hostiles à la théorie de la sélection naturelle. Un débat agité s’annonce.

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Pour en comprendre le sens et la portée, il faut lire Luc Perino, Darwin viendra-t-il?, Paris, Éditions Le Pommer, 338 p., qui reconstruit d’une manière scientifico-romanesque un débat qui n’a pas eu lieu, Darwin ne s’étant pas présenté.

Cet ouvrage agréable, fourmillant de dialogues et de précisions scientifiques, se lit comme un roman d’aventures, l’aventure de l’évolution en fait. Il offre en même temps une mise au point sur la position prudente de Darwin, entre les tenants à tout crin du conservatisme biblique et «l’arrogance des évolutionnistes qui se réclament de lui.» (D. Lecourt, préface)

«Cent cinquante ans plus tard, alors que les énigmes sont levées, le piquant social – osons dire anthropologique – de cette histoire reste intact. Les nouvelles péripéties du créationnisme et du dessein intelligent lui rendent une surprenante actualité.» (Éditeur) Ce livre facile aide à se faire sa propre idée.

Darwinisme social

Une autre mise au point s’imposait aussi en cette année Darwin. Elle concerne le déviationnisme social du darwinisme. Nous y avons brièvement fait allusion dans notre article sur la géopolitique (L’Express, 27 janvier).

Dans certains milieux on a fait de la «survie du plus apte» l’équivalent de la loi du plus fort: élitisme social, domination de race, de classe ou de sexe, esclavagisme, élimination des faibles, eugénisme.

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Patrick Tort, dans L’effet Darwin, Paris, Seuil, 246 p., apporte des précisions sur cette question. «Régression des instincts individuels et progression des instincts sociaux caractérisent donc schématiquement le passage de l’homme sauvage à l’homme civilisé…

Ce qui témoigne d’une telle évolution est le fait massif de la protection des faibles… qui s’oppose au fonctionnement primitif de la sélection naturelle, à savoir leur élimination.» (p. 83)

«Darwin, sa vie durant, défendit et pratiqua le secours aux faibles et il le fit en accord avec sa théorie.» (p. 28)

Il faudrait citer abondamment ce livre puissant, qui donne sa juste compréhension des théories et des ouvrages de ce «géant de la science moderne que fut Charles Robert Darwin» (Le journal du CNRS), qu’il est d’autant plus nécessaire de connaître – et les ouvrages mentionnés ci-dessus permettent de le faire facilement – que se manifestent des théories contraires ou biaisées, et qu’il faut s’informer pour savoir personnellement à quoi s’en tenir.

L’année Darwin est l’occasion de le faire.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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