Dans la vie, il y a des plaisirs démodés, et puis il y a des plaisirs indémodables, comme celui d’aller écouter Charles Aznavour interpréter – ou plutôt incarner – ses chansons sur scène. Et ce plaisir, le géant de la chanson française nous l’offrira de nouveau le 26 avril prochain, à la salle Roy Thomson, dans le cadre d’un nouveau tour de chant intitulé Aznavour en liberté. Lors d’un passage-éclair dans la Ville-Reine, la semaine dernière, l’auteur de La bohème s’est entretenu avec Dominique Denis.
L’Express – La dernière fois que le public torontois a pu vous applaudir, il y a deux ans, on parlait de votre «tournée d’adieu». Et voilà que vous serez de retour sur la scène au printemps. D’où vient le malentendu?
Charles Aznavour – Le malentendu vient d’un de vos confrères, qui ne devait pas tellement connaître les nuances de la langue française! Nous avons annoncé que je faisais ma dernière tournée. Il est vrai que des tournées, je n’en fais plus. Mais «dernière tournée» et «tournée d’adieu», ça ne veut pas dire la même chose. Et comme je dis, quand Martin Scorcese annonce son dernier film, ça ne signifie pas qu’il n’y en aura pas un autre derrière. Il ne fait pas un film d’adieu. Mais j’aime mieux le prendre avec humour, en disant que je suis un ami de Kalashnikov: je fais des adieux à répétition…
L’Express – Au printemps, vous présenterez le spectacle Aznavour en liberté en primeur en Amérique du Nord. Cette fois, vous miserez sur des chansons à texte, que vous avez eu moins souvent l’occasion d’interpréter sur scène. Toutes vos chansons ne sont-elles pas des chansons à texte?
CA – Non, une chanson comme Et pourtant est une chanson bien écrite, mais ce n’est pas une chanson à texte, c’est-à-dire qu’il n’y a pas un fond particulier. C’est une chanson d’amour. Désormais, c’est pareil. En revanche, Non, je n’ai rien oublié, Hier encore ou Sa jeunesse sont des chansons à texte. Et il y en a beaucoup d’autres qui sont passées inaperçues parce qu’elles avaient le désavantage de se trouver derrière une chanson à succès. Je ne me plains pas! Avoir des chansons à succès, c’est le rêve de tous les artistes, mais aujourd’hui, ça ne me sert plus à rien. Et il y a autre chose : en Amérique du Nord, ce que je n’ai jamais fait, c’est de chanter uniquement en français. C’est la première fois que je viens sans chanter en anglais.