Trois films et deux séries à voir sur Prime, Tou.tv, Illico…

Périodiquement dans l-express.ca, l’équipe de Cinéfranco, le festival torontois du film francophone, partage avec vous des suggestions de films ou de séries sur les plateformes Netflix, Apple TV, Crave, Tou.tv et plusieurs autres.

Voici trois films et deux séries disponibles ce mois-ci.

DES HOMMES ET DES DIEUX

«Les hommes ne font jamais de mal aussi complètement et joyeusement qu’ils le font pour des raisons religieuses», selon Pascal. «Ici c’est la confusion et la violence. Nous sommes dans une situation à risque, mais nous persistons dans la foi et la confiance en Dieu», de dire Frère Luc, le médecin.

C’est l’histoire vraie de huit moines de Tibhirine de l’Ordre cistercien de la stricte observance, établis en Algérie au coeur des montagnes de l’Atlas. Ils mènent une vie pieuse, charitable cultivant la terre, soignant les malades des villages…

Leur vie baigne dans l’humilité, l’amour de dieu, les cantiques. Mais la guerre civile de 1996 et la montée islamique sèment le doute, la peur croissante.

En refusant la protection de l’armée d’un «gouvernement corrompu», les moines s’exposent à tous les dangers.

Le suspense est glaçant: l’entrée brusque des terroristes islamistes, le survol de l’hélicoptère au-dessus du monastère, la scène sublime du repas au son du Lac du cygne, un rappel de la cène, un présage marqué par des visages heureux, tristes, en pleurs…

Les acteurs sont absolument remarquables, dont feu Michael Lonsdale, César du Meilleur Second rôle en 2011.

Le film est un écrasant succès à Cannes (Prix Cinéma de l’éducation, Grand prix du jury, Prix du Jury oecuménique), et auprès du public (plus de 3,2 millions d’entrées).

C’est aussi un sublime hommage au sacrifice de ces moines assassinés le 21 mai 1996 pour l’amour de l’Algérie et de l’humanité. Ils s’en sont allés vers Dieu, comme Frère Luc l’avait énoncé, «par la pauvreté, l’échec, la mort».

Des bijoux de dialogues!

ÉTOILE

L’heure est grave pour l’art du ballet. Le public s’éloigne de plus en plus des spectacles en présentiel, et les pressions financières pèsent lourd.

Conscients de cette situation, Geneviève Lavigne, directrice générale du Ballet national et de l’Opéra de Paris, et Jack McMillan, directeur général du Metropolitan Ballet Theatre de New York, travaillent sur un échange de talents pour capter l’intérêt de leur public respectif.

Au bout d’âpres négociations, Geneviève hérite de Tobias Bell (superbe Gideon Glick), le chorégraphe de génie neurodivergent qui bouleverse Le Ballet national. Jack acquiert Cheyenne, la danseuse étoile du Ballet national, à la grande joie du mécène envahissant Crispin Shamblee.

Les séquences de danses sont spectaculaires dans les somptueuses salles de l’Opéra de Paris et les salles modernes du MBT de New York. Elles adoucissent les conflits personnels, amoureux, professionnels très intenses des personnages.

Cheyenne, surjouée par Lou de Lâage, irrite par son caractère revêche traversé de rares moments de grâce. Jack, au jeu nerveux et explosif de Luke Kirby, est en lutte constante.

Geneviève, interprétée par une Charlotte Gainsbourg en maı̂trise de son rôle de femme assaillie par d’immenses défis, se montre à la hauteur même devant ce taureau qui vole la vedette aux chanteurs d’opéra sur scène.

Le monde des affaires toxique, régi par la vente des billets, le mécénat, le profit, entrave sérieusement l’univers de la création artistique.

Selon Le Monde, «Étoile est une série foisonnante et flamboyante, qui témoigne d’une fine connaissance du sujet de la part de ses créateurs, et d’une grande tendresse envers les danseurs et l’artisanat du spectacle.»

LA REVANCHE DES CREVETTES PAILLETÉES

«Tu t’fous de ma gueule! On dirait tous des gais!» s’écrie Selim. «C’est un peu le concept de l’équipe», lui répond Matthias, l’entraîneur des crevettes pailletées, en route vers les Gays Games de Tokyo.

Matthias, autrefois homophobe, sait de quoi il parle: dans le premier opus, Les Crevettes pailletées, sa fédération athlétique l’assigne en représailles à cette équipe de water-polo.

Pour accroı̂tre les chances d’emporter un trophée, il y introduit Selim. Le «gaydar» a du mal à détecter l’orientation sexuelle de Selim… jusqu’à l’atterrissage imprévu de l’équipe dans une région reculée de la Russie où l’homosexualité est considérée comme un fléau.

L’Oreille cinéphile indique que «le film prend évidemment une résonance particulière aujourd’hui, avec une intrigue en Russie et un tournage réalisé en Ukraine. Forcément, le fait que cette dernière soit toujours d’actualité renforce la dimension dramatique du long-métrage… Surtout quand on apprend que plusieurs acteurs et techniciens ukrainiens du film se sont engagés dans l’armée pour combattre les Russes.»

La défense de la liberté sexuelle dans un pays où Poutine décrète en juin 2013 qu’elle est interdite, passe par le tamis des religions, des origines (maghrébines pour Selim), de la thérapie de conversion (cruelle dans les camps de redressement) et des tourments personnels.

Mais vive l’amour des crevettes pailletées qui se battent avec humour et fantaisie pour le plaisir de tous, LGBTTQQIAAP+2S (lesbiennes, gais, bisexuel(le)s, transgenres, transsexuel(le)s, personnes en questionnement, queers, intersexué(e)s, asexuel(le)s, aromantiques, pansexuel(le)s, bispirituelles) et autres.

MONT-ROUGE

«Tout le monde se ferme la gueule. Si les personnes qui savent dénoncent pas. On peut rien faire.» Les propos de Manon, la policière patrouilleuse de Mont-Rouge, village fictif du Nouveau-Brunswick, annoncent la couleur de cette première saison.

Le réalisateur Jim Donovan offre des vues aériennes spectaculaires de la région de Shediac, où a été tourné le film. Il capte à la fois les forêts, les rivages, mais aussi la vie du village dans les bars, les maisons.

Dans ce beau cadre touristique, Tim Coffman est fêté comme le héros de Mont-Rouge. Il vient d’investir une grosse somme d’argent dans la construction d’un spa nordique qui va attirer plus de touristes au Manoir.

Sa propriétaire, Agnès Murray, était jadis la compagne de Tim, qu’elle avoue encore aimer passionnément. Il semble d’ailleurs avoir bien accepté Sandrine Pelletier, la fille d’Agnès, née de son premier mariage. Elles ont un rapport fusionnel.

Mais en cette soirée festive, Tim Coffman est retrouvé mort. Une enquête est alors menée par Luc Doiron, de Moncton, assisté par Manon qui va prouver ses dons d’investigation efficace.

Leur tandem est agréable. Mais les drames personnels compliquent les recherches et teintent les progrès de fortes émotions. La séparation de Manon et de son conjoint Marcel est douloureuse, ses tensions avec sa fille Joanna, 17 ans, dévient parfois l’enquête. Mais Manon reste humaine, sensible et positive.

Interprétée par des acteurs bien posés et crédibles, la démarche reste passionnante avec des fins d’épisode en coups de poing.

VEILLE SUR MOI

Maggie Bougie, la grand-mère maternelle de Zack, élève son petit-fils avec amour depuis trois ans. À l’âge de quatre ans et demi, Zack ne connaît pas sa mère Corinne, dite Coco, qui l’a abandonné pour errer dans la drogue et l’alcoolisme avec Joey, son compagnon toxique.

Mais Coco s’est reprise en main et revient chercher Zack. Bien qu’elle l’aime, va-t-elle tenir la distance?

Maggie était une mère alcoolique vivant avec un homme violent. Corinne était une enfant négligée, traumatisée. Elle ne fait pas confiance à Maggie, qu’elle accuse de vouloir lui voler son enfant. Maggie oscille entre rapprochements, colère, faux espoirs…

«La marde finit toujours par remonter avec elle», s’exclame-t-elle à propos de sa fille.

Le drame est sombre et complexe: chutes et rechutes infernales de Corinne, tribunaux, intervention de la DPE (direction de la protection de l’enfance). Où va atterrir Zack? Maggie est discréditée par l’avocate de Corinne…

La série aborde de façon originale l’impuissance des grands-parents à défendre leurs droits.

L’âpreté qui règne est percutante. Les comédiens sont très convaincants. Guylaine Tremblay (Maggie), créatrice de l’idée originale, et Pascale Renaud-Hébert (Corinne), scénariste de la série, savent nous déchirer le coeur.

Joey, le prédateur sexuel manipulateur, est remarquablement joué par un Guillaume Laurin en contrôle de son rôle diabolique.
La lumière filtre à travers quelques personnages, en particulier Sam (Karine Gonthier-Hyndman franche, sensible), Yolanda (Fabiola Nyrva Aladin aimante). Le petit Zack (Jérôme Hébert) est touchant, ballotté entre deux femmes meurtries.

«Un récit captivant, rempli de vérité et d’espoir, de moments déchirants et d’humanité», promet Radio-Canada.