Le vote des minorités francophones a suivi la tendance nationale

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Publié 21/02/2006 par Paul-François Sylvestre

On est souvent porté à croire que le vote des minorités francophones est de facto acquis au Parti libéral du Canada. Cela était vrai à l’époque de Pierre Elliott Trudeau puisque toutes les circonscriptions fédérales moyennement francophones à l’extérieur du Québec n’élisaient que des députés libéraux. Cette polarisation s’est brisée au cours des dernières élections. Le scrutin du 23 janvier est venu confirmer cela. Le vote francophone a suivi la tendance nationale et s’est avéré de moins en moins libéral.

Pour les francophones hors Québec, le scrutin du 23 janvier 2006 se caractérise par une nette désaffection à l’endroit du Parti libéral, une certaine propension vers le Parti conservateur et un appui légèrement à la hausse pour le NPD.

Lors de la dissolution du Parlement canadien, le 29 novembre 2005, la Chambre des communes comptait 11 députés francophones hors Québec, soit sept en Ontario, trois au Nouveau-Brunswick et un au Manitoba. Ces 11 députés représentaient les trois principales formations politiques canadiennes: le Parti libéral du Canada (9), le Nouveau-Parti démocratique du Canada (1) et le Parti conservateur du Canada (1). Le total des votes exprimés dans ces 11 circonscriptions se répartissait comme suit: 46% pour les libéraux, 31% pour les conservateurs et 21% pour les néo-démocrates.

Parmi les sept députés francophones de l’Ontario, il y avait six libéraux et un conservateur. Deux députés libéraux sortants ne se représentaient pas lors du scrutin de janvier 2006: Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell) et Paul DeVillers (Simcoe-Nord).

On pouvait miser, sur le libéral René Berthiaume pour succéder à Don Boudria mais la lutte a été des plus serrées et c’est le conservateur Pierre Lemieux qui l’a emporté avec une majorité de 210 voix. Le député s’exprime mieux en anglais qu’en français.

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Dans le cas de Simcoe-Nord, aucun candidat francophone ne sollicitait la faveur des électeurs; cette circonscription demeurait donc, au départ, une perte pour la députation franco-ontarienne à la Chambre des communes. C’est le conservateur Bruce Stanton qui a été élu dans Simcoe-Nord.

Pour les autres députés francophones de l’Ontario, la lutte a été très difficile et pas toujours couronnée de succès. Dans le Nord de l’Ontario, le libéral Raymond Bonin (Nickel Belt) a vu sa majorité chuter de 3 208 voix à 2 107, aux dépens du candidat néo-démocrate.

La libérale Diane Marleau (Sudbury) a elle aussi vu sa majorité chuter, de 6 133 voix à 4 584, aux dépens du candidat néo-démocrate. Dans l’est, le libéral Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier) a vu sa très confortable majorité s’effondrer, passant de 13 183 voix à 7 663, aux dépens du candidat conservateur. Le libéral Marc Godbout (Ottawa-Orléans) a dû céder son siège au conservateur Royal Galipeau après une lutte très serrée (25 414 contre 24 215). Enfin, le conservateur Guy Lauzon (Stormont-Dundas-Sud-Glengarry) a vu sa majorité augmenter substantiellement, passant de 3 899 à 14 108 voix, aux dépens du candidat libéral.

Au Nouveau-Brunswick, les Acadiens comptaient deux députés libéraux et un député néo-démocrate. La situation n’a pas changé. Le libéral Dominic LeBlanc (Beauséjour) a vu sa majorité passer de 10 330 voix à 7 089, aux dépens du candidat conservateur. Le libéral Jean-Claude D’Amours (Madawaska-Restigouche) a vu sa majorité passer de 5 407 voix à 5 610, aux dépens du candidat conservateur. Enfin, le néo-démocrate Yvon Godin (Acadie-Bathurst) a vu sa majorité passer de 9 405 voix à 9 618, aux dépens du candidat libéral.

Au Manitoba, le seul député francophone sortant s’est fait réélire. Le libéral Raymond Simard (Saint-Boniface) a cependant vu sa majorité fondre, passant de 6 033 voix à seulement 1 525, aux dépens du candidat conservateur.

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De 2004 à 2006, la députation francophone hors Québec est passé de 11 à 10. Les libéraux ont dégringolé de 9 à 6 et les conservateurs ont grimpé de 1 à 3; le NPD a conservé son seul siège acadien.

En examinant le résultat du scrutin dans les circonscriptions qui ont élu un député francophone en 2004, force est de reconnaître que le vote s’est modifié en 2006 pour suivre la tendance nationale. Le soutien aux libéraux a chuté de 46% à 36% et l’appui aux conservateurs a grimpé de 30% à 36%, tout comme celui aux néo-démocrates qui est passé de 23% à 27%.

Les francophones hors Québec ont élu trois députés conservateurs qui sont d’origine canadienne-française: les nouveaux-venus Royal Galipeau (Ottawa-Orléans) et Pierre Lemieux (Glengarry-Prescott-Russell) ainsi que le député sortant Guy Lauzon (Stormont-Dundas-Sud-Glengarry). Ce dernier sera-t-il nommé ministre délégué aux langues officielles…?

Notons, en terminant, que les trois derniers gouvernements minoritaires conservateurs (1979, 1962 et 1957) n’ont duré que 9 ou 10 mois. Il y a tout lieu de croire que le gouvernement Harper durera plus longtemps car les Canadiens ne veulent pas une autre élection en 2006 et les partis politiques ont d’autres priorités, comme regarnir la caisse électorale ou trouver un autre chef.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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