Krystin Wong-Tam a belle allure dans le Globe and Mail, qui la montre couchée devant le bureau du conseiller municipal Bob Ford. Derrière elle, on aperçoit d’autres protestataires que la douleur de l’offense a cloués au sol. Le conseiller a eu l’ignominieuse idée d’employer le mot ORIENTAUX pour parler de ceux/celles qui viennent de ce qu’on avait coutume d’appeler l’ORIENT. Il ne savait pas, le pauvre, que c’est un terme injurieux à Toronto. Moi non plus. On apprend tous les jours.
Mais, à la réflexion, je me dis que si on me donnait le nom d’OCCIDENTAL, je me sentirais peut-être insulté, moi aussi. En effet une simple analyse des sèmes cachés du mot (Sème, ça veut dire: unité de sens, chez les savants), nous montre que dans OCCIDENTAL, il y a OCCIS, qui est funeste, et DENTAL qui montre les crocs. Brr! On en frémit.
Or, ORIENTAL est encore plus chargé de sens cachés. Faisons-en la sémanalyse, à la façon de Julia Kristeva.
Le mot offensant contient d’abord le sème de l’OR, connoté à l’opprobre de ceux qui s’enrichissent! Et puis –RIENT, évidemment employé pour RIANT, qui nous amène à l’insultant Rire Jaune! Sans compter qu’il y a, bien occulté dans tout ça: RI, connoté avec le RIZ, qui fait suer les ORIENTAUX dans les rizières. Et RI évoque naturellement conneRIe. Enfin les sèmes TAL/TAUX reportent à des proverbes du rire offensant: «TAL qui rit vendredi, dimanche pleurera» et «TAUX ricanant (riz cannant), tôt ricané (dicton chinois)».
Et ce n’est pas tout, côté politiquement incorrect. Notre naïf Bob Ford a cru faire un compliment aux personnes venues du côté du soleil levant en disant que «Les Orientaux travaillent comme des chiens». Il a eu tort de généraliser. Il y a sûrement des Chinois paresseux et Bouddha, si l’on en croit la statuaire et son ventre rebondi, a dû être un fameux cossard.
D’autre part, je connais bien des chiens qui passent leur temps à dormir, gambader, folâtrer et qui seraient désorientés (Oh, pardon!) si on leur disait qu’ils travaillent dur. Sauf, évidemment, les chiens de traîneau.