Avec son sourire qui inspire confiance, sa tête de vedette de téléroman, cette voix chaude et puissante et une polyvalence qui permet de s’approprier tous les styles avec un aplomb frisant la désinvolture, Bruno Pelletier possède tous les atouts pour devenir le genre de chanteur dont on s’arracherait les services pour les plus grandes occasions, des baptêmes aux mariages, en passant par les bar mitzvahs.
Vous me direz que cela fait un bail qu’il n’a plus besoin de boulot strictement alimentaire, mais comme carte de visite, il ne pourrait pas demander mieux que Bruno Pelletier et le GrosZorchestre (Les Disques Artiste/Sélect).
À l’arrière du disque, Pelletier affirme n’avoir voulu que s’accorder une parenthèse en jazzant des chansons qui lui tenaient à cœur, et l’intro de Roxanne (oui, celle des Police) installe soigneusement le décor, tout en présentant ses complices, en l’occurrence Julie Lamontagne au piano, Dave Watts à la contrebasse et Richard Irwin à la batterie.
Mais dès que notre homme balance le premier couplet de sa voix de crooner viril, nous voilà transportés dans le Las Vegas des années Sinatra. Non satisfait de jouer le nouveau venu du «rat pack», Pelletier nous offre un numéro de caméléon en quinze morceaux, comme s’il n’arrivait à décider s’il est Tony Bennett, Tom Jones, Joe Cocker ou le lead singer d’un de ces vilains groupes américains des années 70-80, genre Styx ou Toto.
Mais peu importe l’identité qu’il adopte, les chansons du GrosZorchestre ne servent qu’à mettre en valeur son arsenal de soupirs, de ports de voix et de grognements, entre autres effets qui passent parfois pour de l’émotion. Cela importe peu lorsqu’il balance Just The Way You Are de Billy Joel ou une de ses propres confections rock-détente, mais il eût été préférable qu’il s’abstienne de s’attaquer – et j’emploie le mot dans le sens d’une agression – à La chanson des vieux amants de Brel, qui ne méritait pas un tel sort.