Maurice Henrie au summum de son art

Maurice Henrie, La maison aux lilas, nouvelles, Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa, 2019, 172 pages, 19,95 $.
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Publié 19/01/2020 par Paul-François Sylvestre

Après un carnet de pensées et un recueil de brèves réflexions, publiés aux Presses de l’Université d’Ottawa, Maurice Henrie revient à son genre littéraire préféré, la nouvelle. Il nous offre 27 histoires regroupées sous le titre La maison aux lilas et en profite pour brouiller les frontières entre la fiction et son propre vécu.

Le nouvellier est au summum de son art.

Plusieurs de ces 27 nouvelles sont souvent écrites au «je». On se demande si c’est Maurice Henrie ou un narrateur-observateur qui doute, qui se sent tour à tour coupable, confus ou rebelle…

Une citation est placée en exergue de chaque nouvelle. Plusieurs sont connues, comme «L’homme est un loup pour l’homme» (Montaigne); «Né pour un petit pain» (proverbe canadien); «Couvrez ce sein que je ne saurais voir» (Molière); «Suis-je le gardien de mon frère?» (la Bible); ou encore «Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage» (Du Bellay).

Personnages énigmatiques

Les personnages brièvement mis en scène demeurent souvent énigmatiques. On croise Stéphanie chez qui «il y avait à la fois un mouvement contradictoire de retrait et de rapprochement, un refus et un acquiescement successifs ou même simultanés».

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On suit un monsieur Tague qui joue à la tag avec la vie qu’il ressent comme «un fardeau dont il aurait bien voulu se débarrasser». Ou encore cette femme qui, après les funérailles de son mari, «marche vers l’avenir comme on entre en prison. Ou qu’on en sort.»

Églises, mosquées et synagogues

Dans la nouvelle intitulée Les bancs d’église, le «je» fréquente des églises, mosquées et synagogues, des endroits qui lui font tous ressentir «le même bien-être et la même plénitude».

Un ami lui reproche de se servir de lieux sacrés non pas pour prier, mais dans un but profane. Ce à quoi le narrateur répond qu’il «cherche la paix et la tranquillité d’esprit là où il croit pouvoir les trouver».

Enseignement classique

Je me suis en partie reconnu dans la nouvelle Rescapé du passé qui rappelle certains souvenirs que l’auteur et ancien pensionnaire garde de son cours classique: réveil avant le coq, période d’études avant le déjeuner, sports obligatoires, rosa, rosae, rosam, Macbeth et Phèdre, saint Augustin et saint Thomas d’Aquin.

Les institutions du siècle dernier (collèges, séminaires, académies) n’avaient pas pour objectif premier de préparer à la vie hors de leurs murs, mais plutôt de donner un solide enseignement classique. Henrie écrit que «cet enseignement m’immobilisait littéralement dans un monde qui était en voie de disparition, mais qui l’ignorait encore».

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Participation du lecteur

Je me suis encore plus reconnu dans la nouvelle Une tentative d’évasion, car mon prénom et mon métier sont carrément mentionnés.

Pour briser sa solitude, Vincent tente de se faire de nouveaux amis; il apprend à mieux connaître Denise, accepte d’assister au mariage de Jacques, va à la pêche avec Robert… et «Paul-François le tient au courant de ses activités littéraires». Merci, Maurice, de ce coquin clin d’œil.

La maison aux lilas est un recueil qui interpelle le lecteur et sollicite sa participation. Il s’inscrit dans le long cycle de nouvelles qu’a entrepris l’auteur depuis son tout premier ouvrage en 1988: La Chambre à mourir.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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