Ralph Pudritz est physicien à l’Université McMaster, en Ontario, et il croit aux extra-terrestres. De même que son collègue biophysicien Paul C. Higgs. De même que la biologiste Jenn Macalady, de Pennsylvanie, spécialiste des génomes bactériens. De même que l’astronome Richard Greenberg, à l’Université de l’Arizona. Et son collègue de l’Université de Montréal Robert Lamontagne. Et François Raulin, de l’Université de Paris, spécialiste des lunes de Saturne. Et beaucoup, beaucoup d’autres.
On est bien loin du cliché du scientifique ostracisé parce qu’il prononce le mot «extra-terrestre». Au contraire, non seulement ce mot a-t-il une discipline bien à lui, l’astrobiologie, mais en plus, note Robert Lamontagne, «c’est devenu sexy». Si vous faites une recherche sur des bactéries primitives vivant dans un environnement inhospitalier, c’est plus vendeur de les lier à la possibilité de vie sur d’autres planètes, que de vous contenter de parler des «extrémophiles de cavernes sulfuriques».
En astronomie, le développement le plus spectaculaire, c’est la chasse aux planètes tournant autour d’étoiles autres que notre Soleil. Depuis 1995, on en a détecté plus de 200 et la «planète extra-solaire» Gliese 581 dont la détection a été annoncée récemment est non seulement la plus petite de l’histoire – «seulement» cinq fois la masse de la Terre – mais surtout, la première qui soit théoriquement habitable, parce qu’elle n’est ni trop près de son étoile, ni trop loin.
«C’est une percée incroyable, réagit Ralph Pudritz, qui dirige à McMaster le seul programme de recherche en astrobiologie au Canada. Cela veut dire que la recherche d’une signature d’eau autour de cette planète va devenir très importante.»
Or, une telle recherche sera extrêmement difficile, compte tenu des distances – 21 années-lumière, la distance entre Gliese 581 et nous, ça n’a l’air de rien, mais ça nécessite 14 zéros si on le calcule en kilomètres! – et elle exigera la contribution d’astrophysiciens, de chimistes, d’ingénieurs… Ce qui est précisément la raison d’être de l’astrobiologie: rassembler des chercheurs de disciplines très éloignées.