Notre voyage Toronto-Paris avait mal commencé. Nous sommes un vieux couple qui s’épuise vite a courir dans les couloirs des aéroports. Air France, compatissant, nous fournit d’habitude une chaise roulante. Or ce jour-là une horde bruyante et colorée de miséreux assez éclopés mais plus lestes que nous, accaparent tous les véhicules, chaque fois qu’il en arrive un. On se résigne alors à traîner notre bagage sans l’aide de personne, jusqu’à l’embarquement.
Notre vol du 28 juin a deux heures de retard, certainement explicable pour un 747 de plus de 500 passagers, mais qu’on a vite fait de penser inexcusable. On va rater notre correspondance à Paris avec un TGV.
Mais on est optimiste à Air France et on nous console gentiment. On va s’occuper de nous. On nous conjure, à l’arrivée, d’attendre que l’avion se vide complètement: le temps que vous perdez maintenant, vous allez le gagner a la sortie. Car quelqu’un d’Air France vous attend et vous emmène a toute vitesse à l’aérogare. Quelle gentillesse! Malheureusement, la sortie de l’énorme Boeing prend quarante minutes, qui sont un calvaire.
Surprise! À la sortie de l’avion, on retrouve non pas la personne futée promise qui nous voiturerait au train, mais la même horde du départ de Toronto, prompte à s’approprier toutes les chaises roulantes. Ils les occupent encore une fois, instantanément, sous l’œil indifférent d’un garde chiourme, qui attend les retardataires. Il nous enjoint de rester tranquilles, nous laissant debout sur une haute plateforme pendant une demi-heure encore, en plein soleil et vent.
Finalement, un grand moustachu de gitan prend pitié de Monique, effondrée, et lui donne sa voiture. Un inconnu serviable la pousse jusque au milieu d’une foule où elle est brusquement abandonnée. Nous cherchons la maudite gare du TGV. Personne pour nous renseigner. De toute façon, notre train est parti depuis longtemps.