Cher Daniel Soha, j’ai lu avec intérêt votre article, intitulé «Hors de Shakespeare et de Mirvish, point de salut» (publié dans L’Express de la semaine dernière) dans lequel vous déplorez le peu d’intérêt que manifestent les francophones de Toronto pour la magnifique pièce Littoral de Wajdi Mouawad présentée en ce moment au Factory Theatre.
De manière générale, vous regrettez aussi le peu de cas que les Torontois, toutes origines linguistiques confondues, font de la culture. Selon vous, l’expression théâtrale dans la région de Toronto serait confinée aux festivals de théâtre classique, les festivals Stratford et Shaw, pour ne citer qu’eux, et les grosses productions de la maison Mirvish.
J’ai lu votre article avec d’autant plus d’intérêt que je dirige la seule compagnie de théâtre francophone à Toronto et dans le sud de l’Ontario capable d’offrir une saison régulière de productions francophones d’ici ou d’ailleurs: le Théâtre français de Toronto (TfT). Et je dois dire que votre article m’a beaucoup chagriné.
D’abord, vous semblez remettre en cause l’existence même d’une communauté francophone à Toronto parce qu’elle n’aurait pas de «lieu géographique», de «lieux de culte et de réunion» où l’on se rencontre, où l’on discute et où l’on se dispute. Rappelons que les francophones sont théoriquement chez eux partout à Toronto puisque le français est l’une des deux langues officielles du Canada.
Surtout, je ne crois pas que l’on puisse affirmer que la communauté francophone n’a pas ses lieux de rencontre. J’en veux pour preuve le succès du TfT que j’ai le bonheur de diriger depuis huit ans et qui existe depuis 1967. Bientôt 40 ans! Beaucoup de compagnies de théâtre anglophones nous envient l’ambiance chaleureuse et conviviale qui règne dans notre théâtre, situé sur la rue Berkeley.