Après La Réparation (2011), Katia Gagnon poursuit son observation de la société québécoise et de ses marginaux dans Histoires d’ogres. Elle nous propose un roman qui se lit comme un polar, un roman qui commence étrangement par six courtes nouvelles dont les personnages s’entrecroisent ensuite dans une intrigue savamment orchestrée.
Katia Gagnon est chef de la section Enquêtes à La Presse. On peut aisément croire que ses recherches et reportages lui ont permis de camper des personnages plus vrais que nature. Sa solide connaissance du milieu montréalais lui permet aussi de décrire en quelques mots toute la sociologie du choc culturel que peut ressentir un enquêteur.
Ainsi, écrit la romancière, il est impensable de trouver un frigo vide à Boucherville alors que cela «ne veut pas dire nécessairement une famille incompétente» dans Hochelaga-Maisonneuve. Le roman est truffé de réflexions sociologiques, philosophiques ou psychologiques, parfois enrobées dans des répliques coup-de-poing.
Histoires d’ogres regorge aussi de références à plusieurs romans puisqu’un des personnages tient la Librairie Batèche. Une de ses clientes est la journaliste Marie Dumais à qui il recommande la lecture des livres suivants: Le Grand Cahier d’Agota Kristof, L’Amélanchier de Jacques Ferron, Les Enfants de minuit de Salman Rushdie et Les Liaisons dangereuses de Pierre Choderlos de Laclos.
Marie Dumais veut écrire un portrait de Stéphane Bellevue, un pédophile en libération conditionnelle qui a purgé une peine pour le meurtre sordide d’un adolescent.
Bellevue est l’ogre principal du roman et il a un besoin chronique d’attention. Cette soif fait de lui «une bombe à retardement» et place Dumais dans une situation pour le moins inconfortable.