Des propos récents du premier ministre Stephen Harper et du ministre de la Justice Peter MacKay sur ce qu’ils décrivent comme une interférence inappropriée, l’an dernier (!), de la juge en chef de la Cour suprême, Beverley McLachlin, dans le processus de nomination d’un juge, portent atteinte à l’une des institutions les plus fondamentales de l’ordre constitutionnel canadien.
Notre premier ministre n’aime pas être contrarié. S’il fait des erreurs en nommant des Brazeau, Duffy et Wallin au Sénat, il prétend qu’il n’a rien à voir avec les problèmes que ses erreurs ont entraînés.
Il en va de même avec la nomination de son candidat pour occuper un des neuf postes de juges de la Cour suprême du Canada. Si son choix est déclaré inadmissible à siéger au plus haut tribunal, il tente de discréditer la juge en chef pour éviter d’avoir à porter le blâme.
M. Harper se dit surpris d’apprendre que, pour occuper un des trois sièges réservés au Québec, il ne peut nommer à la Cour suprême une personne qui n’est pas inscrite au Barreau du Québec depuis plus de 10 ans, ou juge de la Cour d’appel ou de la Cour supérieure du Québec. Pourtant, l’exigence de choisir un membre de l’une de ces trois institutions québécoises fait partie de la législation fédérale depuis la toute première loi sur la Cour suprême, en 1875.
J’ouvre ici une parenthèse. Dans le dossier Conseil scolaire francophone de la Colombie‑Britannique c. Colombie‑Britannique, 2013 CSC 42, M. Harper ne s’est pas montré surpris d’apprendre qu’une loi votée en Angleterre en 1731, alors que la Colombie-Britannique n’existait même pas, ne permet pas aujourd’hui aux francophones de cette province d’utiliser le français dans les instances civiles.