Absence d’exécution réciproque de jugements entre l’Ontario et le Québec

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Publié 11/06/2013 par Gérard Lévesque

«Le Reciprocal Enforcement of Judgements Act de l’Ontario n’a pas été signée par la Province du Québec. Conséquemment, l’Abbé Gravel devra intenter une action en Ontario s’il n’obtient pas paiement des dommages accordés par le juge au fond. Le tribunal ontarien va traiter le jugement du Québec comme une dette que les défendeurs n’ont pas payée.»

C’est ce qu’a écrit le juge Paul Mayer, de la Cour supérieure du Québec, le 11 janvier dernier, dans l’affaire Gravel c. Lifesitenews.com, 2013 QCCS 36.

Dans ce dossier, le tribunal était saisi de trois requêtes pour faire déclarer abusive la demande en justice de l’Abbé Raymond Gravel qui se dit victime d’une campagne de dénigrements de la part des défendeurs depuis près d’une décennie.

Cette cause illustre bien le conflit entre deux droits fondamentaux: la liberté d’expression des défendeurs et celui de la réputation de l’abbé Gravel, un prêtre catholique qui a été député bloquiste (2006-2008) de Repentigny à la Chambre des communes.

Je présume que, si le juge Mayer a référé au nom anglais de la loi ontarienne, c’est que les avocats qui ont plaidé devant lui, ne savaient pas qu’en Ontario, les projets de loi sont présentés et adoptés à l’Assemblée législative en français et en anglais, et que la version française et la version anglaise de la Loi sur l’exécution réciproque de jugements, LRO 1990, c R.5, ont également force de loi.

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En rejetant les requêtes des défendeurs, le juge Mayer a signalé indirectement une anomalie qui devrait retenir l’attention des législateurs de l’Ontario et du Québec et des organismes voués à l’accès à la justice: l’absence d’exécution réciproque de jugements entre les deux provinces.

Les similarités entre les juridictions de common law et le système de droit civil du Québec sont plus grandes que leurs différences. L’Ontario et le Québec collaborent déjà pour l’exécution réciproque des ordonnances alimentaires.

À mon avis, il est temps d’en faire autant pour les autres jugements de leurs tribunaux. Il n’est pas normal d’exclure les jugements du Québec de la possibilité d’être enregistrés au greffe des tribunaux ontariens alors que les jugements en provenance de toutes les autres provinces ainsi que des trois territoires du Canada bénéficient de cet avantage.

Au point de vue de l’historique des lois ontariennes, il y a lieu de rappeler que, par les articles 54 à 56 du Judicature Act, R.S.O. 1980, c. 223, l’Ontario reconnaissait un statut spécial aux jugements du Québec. Toutefois, ces articles n’ont pas été intégrés dans la Loi sur les tribunaux judiciaires qui, en 1985, a remplacé l’ancienne loi unilingue anglaise.

Renseignements

Décision du juge Mayer dans le dossier de l’abbé Gravel

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Texte de la loi ontarienne sur l’exécution réciproque de jugements

Les articles 54 à 56 de l’ancienne loi Judicature Act

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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