Alfred Hitchcock a déjà dit que «le crime n’a rien d’extraordinaire en soi, ce qui me fascine ce sont les détails de ce crime». C’est ce qui fascine aussi Raymond Ouimet, chroniqueur en histoire et auteur de Tuxedo Kid, un dossier criminel bien documenté sur Léo-Rhéal Bertrand (1913-1953), un bel homme gentil, prévenant, bien éduqué et… assassin d’au moins une de ses deux épouses.
Léo-Rhéal Bertrand reçoit le surnom Tuxedo Kid parce qu’il se présente en cour comme s’il participait au plus chic gala de la haute société. Ce Québécois frappe par sa beauté, son charisme, ses talents musicaux et sa débrouillardise. Il jure cependant dans le décor familial en raison de sa paresse et de ses mensonges. L’auteur écrit que Bertrand est «menteur comme un soutien-gorge» ou «menteur à mille-feuilles».
Voleur de moutons dans sa jeunesse, avorteur amateur à Ottawa-Hull, auteur d’un hold-up raté en banlieue d’Ottawa, Bertrand se marie pour faire de l’argent, soit via la police d’assurance-vie de sa première épouse, soit via un partage des biens considérables de sa seconde épouse. Reste juste à les envoyer ad patres!
Dans ce récit d’une affaire criminelle très médiatisée dans les années 1930 et 1950, Raymond Ouimet fournit plein de renseignements sur les enquêtes policières de l’époque, les cours de justice, les pénitenciers de Kingston et de Montréal. Comme le Tuxedo Kid a vécu à Ottawa au début des années 1930, Ouimet nous apprend que le détective Jean Tissot y a mené une campagne antisémite et qu’il était alors appuyé par l’Ordre de Jacques-Cartier.
En dix-neuf années, le Tuxedo Kid «a subi pas moins de cinq procès, dont quatre pour meurtre, et a obtenu cinq sursis». Il a bénéficié d’un adage selon lequel il vaut mieux avoir un coupable en liberté qu’un innocent en prison. Mais il y a une limite à la présomption d’innocence, limite que Léo-Rhéal Bertrand franchit en 1951.