«Un jugement déclaratoire est une réparation d’une portée restreinte. Il peut être obtenu sans cause d’action, et les tribunaux rendent des jugements déclaratoires, peu importe si une mesure de redressement consécutive peut être accordée… le jugement déclaratoire peut être le seul moyen de donner effet au principe de l’honneur de la Couronne… si les Métis avaient sollicité des réparations personnelles, le raisonnement adopté en l’espèce ne pourrait s’appliquer… Le principe de la réconciliation commande que ce type de déclaration puisse être accordé… La Constitution est la loi suprême de notre pays, et elle demande que les tribunaux soient habilités à en protéger la substance et à en faire respecter les promesses.»
Passant outre à la doctrine exigeant qu’une procédure judiciaire fondée sur l’équité soit engagée sans retard injustifié et à l’argument selon lequel le grief soulevé avait pris naissance il y a près d’un siècle et demi et, qu’en conséquence, la demande était irrecevable en raison des règles de la prescription, la Cour suprême du Canada a décidé, le 8 mars dernier, que les Métis du Manitoba ont droit à un jugement déclarant que la Couronne fédérale n’a pas mis en œuvre de façon honorable la disposition prévoyant la concession de terres énoncées à l’article 31 de la Loi de 1870 sur le Manitoba.
«Aussi longtemps que la question ne sera pas tranchée, l’objectif de réconciliation et d’harmonie constitutionnelle… n’aura pas été atteint. Le clivage persistant dans notre tissu national… demeure entier. La tâche inachevée de réconciliation des Métis avec la souveraineté du Canada est une question d’importance nationale et constitutionnelle.»
Écrite par la juge en chef McLachlin et la juge Karakatsanis, la décision majoritaire rappelle l’époque où le peuple métis composait 85% de la population de ce qui est aujourd’hui le Manitoba.
Outre les Premières nations, le territoire avait en effet vu naître un nouveau groupe autochtone: «les Métis — issus des premières unions entre les explorateurs et négociants européens et les femmes autochtones. À l’origine, les descendants de parents anglophones étaient appelés les Sang‑mêlé, alors que ceux ayant des racines françaises étaient appelés les Métis.»