On dit souvent que le premier roman d’un jeune écrivain renferme une large part autobiographique. Dans le cas de Francis Chalifour, il semble que ce soit plutôt le second roman qui revête des accents très personnels, des touches extrêmement intimistes. Les quatre premiers mots, c’est-à-dire le titre, donnent déjà le ton: Le Fils du pendu.
Né à Joliette (Québec) en 1977, Francis Chalifour enseigne les sciences sociales à l’École secondaire Étienne-Brûlé à Toronto. Ayant perdu son père lorsqu’il était jeune, cet enseignant a écrit un roman qu’on imagine probablement autobiographique (le protagoniste est François alors que l’auteur se prénomme Francis). L’ouvrage a d’abord paru dans sa version anglaise (After) et a été en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général en 2005.
Le jeune François est en voyage à New York, avec sa classe de l’école secondaire, lorsqu’il reçoit un appel lui ordonnant de rentrer d’urgence à Montréal. Il apprend que son père est mort et, qui plus est, qu’il s’est pendu. «Je ne connaissais personne dont un des parents était mort. J’avais honte de dire que mon père était mort. J’avais encore plus honte de dire qu’il s’était suicidé. Je ne voulais pas qu’on me prenne pour un genre d’extraterrestre.»
Le roman brosse un portrait bouleversant de la pénible année qui suit ce terrible drame familial. Les lecteurs et lectrices suivent l’ado dans ses questionnements et ses tiraillements. À un moment donné, François se dit que la vie peut ressembler à une partie de poker (son père lui avait montré à jouer au poker). L’ado croit que «certaines personnes ont les plus belles cartes, alors que d’autres ne font que rêver qu’elles auront un jour une main convenable».
Le garçon se sent responsable, voire coupable de ce qui est arrivé. François est convaincu qu’il a été une telle déception pour son père que ce dernier n’a pas jugé nécessaire de rester présent pour voir son fils grandir. L’enfant se trouve laid et maigre. Il a une piètre opinion de lui-même: «Au travail, je vaux sept dollars l’heure. À l’école, je vaux 51% en mathématiques. Si je ne vaux rien, aussi bien faire comme mon père.»
Au début, une seule question hante l’orphelin: pourquoi? Mais personne ne peut vraiment lui donner une réponse satisfaisante. Peut-être parce que ce n’est pas la bonne question à se poser. En effet, petit à petit, l’ado en vient à comprendre qu’il est inutile de se demander pourquoi, alors qu’il faut plutôt s’interroger sur ce qu’on doit faire après. C’est cela qui compte. Dans sa version anglaise le roman s’intitule d’ailleurs After.