Ontario: les Libéraux sont divisés sur le conflit avec les enseignants

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Publié 18/12/2012 par La Presse Canadienne et L'Express

à 21h48 HNE, le 6 janvier 2013.

AJAX, Ont. – Les candidats à la chefferie du Parti libéral de l’Ontario sont divisés sur la stratégie à adopter afin de mettre fin au conflit de travail avec les enseignants des écoles publiques de langue anglaise, qui en veulent au gouvernement d’avoir imposé de nouveaux contrats de travail sous la tutelle d’une loi anti-grève controversée.

Le sujet des enseignants n’a été que brièvement mentionné lors d’un débat de deux heures entre les candidats et ce, malgré la présence de nombreux manifestants qui les attendaient à l’extérieur du Centre des congrès d’Ajax, à l’est de Toronto.

Environ 2500 délégués libéraux choisiront une ou un successeur au premier ministre Dalton McGuinty du 25 au 27 janvier lors d’un congrès à Toronto.

L’ancien ministre de l’Éducation Gerard Kennedy a rencontré les protestataires et a été le seul candidat à déclarer qu’il déchirerait la nouvelle convention collective qui a été imposée aux enseignants. Il recommencerait ensuite les négociations.

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Aucun autre candidat n’a dit qu’il irait aussi loin, mais ils ont tous au moins promis aux leaders du syndicat qu’ils tenteraient de résoudre le conflit.

Kathleen Wynne, une autre ancienne ministre de l’Éducation, a dit n’avoir jamais souhaité que les contrats soient imposés aux enseignants, mais a ajouté qu’elle n’irait pas jusqu’à les déchirer si elle devenait première ministre.

Après le débat, elle a soutenu qu’on ne pouvait pas recommencer à zéro et qu’il fallait plutôt chercher à aller de l’avant et faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit.

L’ancienne membre du cabinet Sandra Pupatello — qui, comme M. Kennedy, ne faisait pas partie du gouvernement quand la loi a été approuvée en septembre — a mentionné que son recul par rapport à la loi lui permettrait peut-être d’établir une meilleure relation avec les enseignants.

Au cours de l’avant-dernier débat dans la course à la chefferie du Parti libéral, les sept candidats ont surtout discuté du transport, des soins de santé dans la grande région de Toronto et de leurs priorités en tant que premier ministre. La course se conclura à la fin du mois de janvier.

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Mais l’un des plus grands défis qui attend l’éventuel successeur du premier ministre Dalton McGuinty sera de rebâtir les liens qui unissaient le Parti libéral aux enseignants, un puissant groupe qui a aidé les libéraux à garder le pouvoir pendant neuf ans.

Les professeurs qui ont manifesté à l’extérieur du Centre des congrès veulent que le prochain premier ministre annule ces contrats de travail et en négocie de nouveaux avec les syndicats.

M. McGuinty a promis d’abroger la controversée législation qui a donné à son gouvernement le pouvoir d’imposer une convention collective aux enseignants. Mais plusieurs des manifestants ont déclaré qu’une telle initiative ne les incitera pas à voter pour le Parti libéral lors du prochain scrutin provincial.

«En fait, ça me met encore plus en colère parce qu’ils ont déjà appliqué la loi, et maintenant qu’ils n’en ont plus besoin, ils veulent la faire disparaître, ce qui ne change rien à notre situation», a affirmé Helen Lockhart, une enseignante au niveau secondaire depuis 13 ans.

Activités parascolaires

Les professeurs d’écoles élémentaires en guise de protestation contre la loi 115, tandis que les enseignants d’écoles secondaires ont mis un frein aux activités parascolaires et à leurs tâches administratives.

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M. McGuinty a confié avoir lui-même appelé les dirigeants syndicaux afin qu’ils demandent aux enseignants de reprendre les activités parascolaires mais Mme Lockhart — et d’autres professeurs manifestant à l’extérieur du Centre des congrès — ont clairement fait savoir qu’ils n’acquiesceront pas à cette demande.

Mme Lockhart a interrompu toutes ses activités parascolaires — incluant les trois groupes musicaux qu’elle dirigeait — et ne compte pas les reprendre tant que la convention collective, d’une durée de deux ans, sera en vigueur.

Loi anti-grève

La date limite pour des négociations entre les syndicats d’enseignants et les commissions scolaires qui n’avaient pas encore conclu de convention collective était le 31 décembre 2012.

Les enseignants catholiques anglophones, de même que ceux des deux systèmes de langue française, ont conclu des ententes avec le gouvernement cet été.

Les écoles françaises, publiques et catholiques, peuvent toutefois être affectées par des grèves du zèle de certains employés membres d’autres syndicats que celui qui représente les enseignants franco-ontariens.

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La ministre de l’Éducation, Laurel Broten, a indiqué qu’elle forçait les enseignants du primaire et du secondaire qui ne l’avaient pas encore fait à accepter ces conventions — qui prévoient notamment le gel des salaires — en vertu d’une loi antigrève, la loi 115.

Le gel salarial et d’autres compressions, pour les enseignants comme pour d’autres catégories de fonctionnaires, sont nécessaires, selon le gouvernement, pour juguler l’endettement de la province, dont le déficit cette année s’élève à 14 milliards $.

Avant Noël, des dizaines de milliers d’élèves du primaire de huit commissions scolaires ontariennes – dont la plus importante, le TDSB à Toronto – ne sont pas rentrés en classe, alors que leurs enseignants tenaient des grèves d’une journée.

Abus de pouvoir?

Le président de la Fédération des enseignants de l’élémentaire de l’Ontario, Sam Hammond, estime que le gouvernement a fait un «mauvais usage de son pouvoir» en ayant recours à une loi «sans précédent et autocratique» pour imposer les conventions collectives, puis en abrogeant simplement cette loi une fois les décrets adoptés.

Les conseils scolaires aussi – qui s’estiment la véritable partie patronale des enseignants – ne sont pas heureux de la situation. Selon la présidente de l’AFOCSC (les huit conseils scolaires catholiques franco-ontariens), Melinda Chartrand, «la loi confie des pouvoirs sans précédent à la ministre de l’Éducation et ceci nous préoccupe beaucoup. Cette imposition de conventions collectives vient éroder des droits constitutionnels des francophones d’assumer la gestion de leurs écoles et s’agit d’une ingérence indue de la part du gouvernement provincial».

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Jeudi, la ministre a donc approuvé 65 ententes négociées et ratifiées localement, présentées par les conseils scolaires avant la date limite du 31 décembre 2012 figurant dans la «Loi donnant la priorité aux élèves».

Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) s’est vu accorder jusqu’au 14 janvier pour faire ratifier 110 ententes locales.

Grâce à un décret, le gouvernement a mis en place des contrats pour tous les conseils scolaires et syndicats qui n’ont pas remis de conventions collectives ratifiées et approuvées avant la date d’échéance (sauf pour ceux qui ont ont obtenu une prolongation jusqu’au 14 janvier).

Gel dans toute la fonction publique?

Les Libéraux minoritaires ont adopté la loi spéciale à la fin de l’été, avec l’appui des Progressistes-Conservateurs de Tim Hudak qui prônent un gel salarial dans toute la fonction publique. Les Néo-Démocrates d’Andrea Horwath ont voté contre, estimant notamment que la loi est inconstitutionnelle.

Selon le gouvernement, les nouveaux contrats permettront à la province d’économiser 250 millions $ en 2012-2013, et 540 millions $ en 2013-2014. Ces économies s’ajouteraint aux économies ponctuelles de 1,1 milliard $ réalisées grâce à l’élimination des journées de congé de maladie accumulées.

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Les négociations contractuelles avec les syndicats représentant le personnel enseignant et le personnel de soutien durent depuis février 2012. 55 000 enseignantes et enseignants, 4 000 membres du personnel de soutien et 55 000 travailleuses et travailleurs du secteur de l’éducation du SCFP ont négocié des ententes qui respectent les objectifs financiers du gouvernement

«Nous avons négocié pendant plus de 10 mois et avons passé des centaines d’heures autour de la table de négociation», rappelle la ministre Broten. «J’ai personnellement rencontré les syndicats et associations à 80 reprises pour leur parler… Cela prouve à la Fédération des enseignantes et des enseignants de l’élémentaire de l’Ontario, qui n’a passé qu’une heure à négocier, et à la Fédération des enseignantes/enseignants des écoles secondaires de l’Ontario(FEESO), que j’ai rencontrées il y a près de 10 jours de cela, qu’il est encore temps de négocier.»

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À LIRE AUSSI DANS L’EXPRESS: d’autres reportages et éditoriaux sur le conflit entre les enseignants et le gouvernment.

D’autres reportages et éditoriaux sur la course au leadership et le parcours de Kathleen Wynne.

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