22 minutes de trop!

Liberté et patrie de Jean-Luc Godard

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Publié 16/01/2007 par Yann Buxeda

Godard sera toujours Godard, avec sa poignée d’admirateurs et son cortège de détracteurs. Mais si Chaplin fut en son temps unanimement reconnu comme un génie du 7e art, Godard cultive une autre forme de singularisme. Un peu à l’image de l’art conceptuel ou contemporain, il a ceci de génial qu’il est à ce jour toujours incompris de la plupart de ses contemporains, mais qu’il vaut de l’or dès lors que l’on y prête attention. Ce qui n’est pas toujours évident…

«Dans les milieux dits artistiques, où le souci que j’ai de refaire mes toitures me pousse encore trop souvent à sucer des joues dans des cocktails suintants de faux amour, on rencontre des brassées de démocrates militants qui préféreraient crever plutôt que d’être plus de douze à avoir compris le dernier Godard.»

Malheureusement, Pierre Desproges, illustre amuseur public français, n’aura pas eu le bonheur de pouvoir profiter de la pertinence de l’oeuvre de Godard jusqu’au bout. Et pourtant, il y aurait bien des choses à dire sur les derniers travaux expérimentaux du réalisateur franco-suisse.

Liberté et patrie, qui fait l’objet de cette critique, en est un exemple tout à fait commun, puisqu’il cristallise à lui seul, en 22 minutes, l’essence même de ce qui fait l’identité de son géniteur.

Une oeuvre commandée pour l’Expo Suisse 2002 qui tourne autour de deux questions précises: Qu’est-ce que la réalité? Et qui impose son interprétation? Deux problématiques liées qui ont inspiré au réalisateur un film particulier, qui s’appuie sur des images de va-et-vient de trains le long du lac Léman entrecoupées par des peintures d’Aimé Pache, qui partit pour Paris avant de revenir dans le Vaudois dans les années 60, afin d’achever un de ses tableaux.

Alors voilà, la critique a ceci d’injuste qu’elle n’est que le reflet d’un unique point de vue, qui plus est potentiellement troublé par des événements extérieurs. Liberté et patrie, dans la lignée des autres films de Godard, propose une expérience tout à fait particulière et unique dans le monde de l’ennui.

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Le propos qui y est développé est une nouvelle fois inaccessible au commun des mortels, et l’on se perd en conjectures au fur et à mesure que l’on s’éloigne ou se rapproche du sujet initial. Subtil jeu d’objectifs diront certains…

D’autres n’y verront qu’une simple démarche destinée à noyer le spectateur pour que la déstructuration du propos du film ne soit plus au premier plan. Difficile de se faire une idée de ce Godard donc, puisque, fidèle à lui-même, le réalisateur ne laisse que quelques minces indices pour que son spectateur puisse emprunter le bon cheminement.

Certains crieront au génie, d’autres préféreront le substituer à un genre plus classique mais ô combien plus abordable. Au final, une seule chose positive pour les détracteurs de Godard, la concision. Un choix que ne renierait pas Coluche, qui rendit en son temps hommage à l’oeuvre du fondateur de la Nouvelle Vague: «Je suis allé voir le dernier Godard au cinéma. Eh bien, croyez-moi, la fin est heureuse… on finit en effet par sortir de la salle.»

Un aller-retour devant l’écran qui vous sera proposé par Cinémathèque Ontario le 21 janvier à 18h30 au Jackman Hall de l’AGO, au 317 rue Dundas.

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