20 ans de vitalité franco-ontarienne

De la Loi sur les services en français à l’indépendance de TFO

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Publié 14/11/2006 par Paul-François Sylvestre

La Loi ontarienne sur les services en français ou Loi 8 célèbre cette année son 20e anniversaire. Adoptée sous le règne du premier ministre David Peterson, cette loi constitue un important jalon dans la vie politique de la province la plus populeuse du Canada. À l’occasion de cet anniversaire, je vous propose un survol du chemin parcouru entre 1986 et 2006.

Quelques semaines après l’adoption de la Loi 8, les Franco-Ontariens ont de nouveau l’occasion de se réjouir puisqu’ils assistent à la création d’un réseau distinct de télévision française sous l’égide de TVOntario. Appelé La Chaîne, ce réseau entre en ondes le 1er janvier 1987. Il sera rebaptisé TFO en juin 1995. Il est le seul télédiffuseur francophone canadien dont les activités principales se situent à l’extérieur du Québec.

De tous les dossiers qui ont retenu l’attention des Franco-Ontariens, celui de l’éducation est toujours demeuré en tête de liste. Des gains sont faits le 1er décembre 1988 lorsque le Conseil des écoles françaises de la communauté urbaine de Toronto et le Conseil scolaire de langue française d’Ottawa-Carleton sont créés. Ils entrent en vigueur le 1er janvier 1989.

Puis, en 1996, le gouvernement procède à une refonte du système des conseils scolaires en Ontario et fait adopter la Loi de 1997 réduisant le nombre de conseils scolaires. On passe de 129 à 72 conseils scolaires, dont 12 de langue française.

Depuis 1997, la Loi sur l’éducation devient conforme à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés de 1982 et à la jurisprudence qui confirme le droit de la minorité francophone de gérer son propre système d’éducation.

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Toujours en matière d’éducation, un important pas est franchi en septembre 1990 lorsque la Cité collégiale devient le premier collège d’arts appliqués et de technologie de langue française en Ontario et le 23e collège communautaire de la province. L’institution voit le jour dans le but de répondre aux besoins et aux aspirations des quelque 200 000 francophones de l’Est ontarien en matière d’enseignement collégial.

L’année 1992 est témoin de neuf manifestations pour revendiquer la création d’autres collèges communautaires de langue française en Ontario. Organisées sous l’égide de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne, ces manifestations se déroulent le 27 novembre 1992. Six mois plus tard, le gouvernement de l’Ontario annonce la création du Collège des Grands Lacs (Sud), du Collège Boréal (Nord) et d’un nouveau campus pour la Cité collégiale dans l’Est ontarien.

Deux regroupements

Les administrations municipales ne sont pas soumises à la Loi sur les services en français. Cela n’empêche pas la mairesse de la cité de Vanier, Gisèle Lalonde, de lancer l’idée d’un regroupement francophone des municipalités.

L’Association française des municipalités de l’Ontario (AFMO) tient sa première assemblée annuelle le 19 août 1990. En 2006, quelque quarante municipalités ontariennes étaient membres de l’AFMO, dont Ottawa, Toronto, Sudbury, Thunder Bay, Timmins, Welland et Windsor.

Un autre regroupement voit le jour en mai 1990. Il s’agit de la Chambre économique de l’Ontario (CEO). Créée dans le but de valoriser le monde des affaires et promouvoir les intérêts économiques des Franco-Ontariens, la CEO compte, à ses débuts une cinquantaine de membres localisés principalement dans la région de la capitale nationale; quinze ans plus tard, elle regroupe 1 125 membres et 22 regroupements répartis dans toutes les régions de la province.

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Culture

Au niveau culturel, il importe de souligner un point tournant en 1994. Sept ans plus tôt, le gouvernement de l’Ontario avait créé le Prix Trillium Book Award pour souligner l’excellence des écrivains de la province. Le jury étant majoritairement anglophone, les écrivains franco-ontariens ne remportaient jamais ce prix.

Après des pressions exercées par l’Association des auteures et auteurs de l’Ontario français, le gouvernement annonce qu’il décernera le premier Prix Trillium de langue française le 27 avril 1994.

Depuis 1994, la culture franco-ontarienne est largement mise en évidence lors d’un événement provincial de grande envergure. Il s’agit des Jeux franco-ontariens organisés sous l’égide de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne. Les premiers Jeux ont lieu à Orléans, du 20 au 23 mai 1994.

Ils représentent le plus grand rassemblement provincial annuel de jeunes francophones qui font valoir leurs talents dans six grands volets: sports-athlétisme, arts visuels, improvisation théâtrale, quiz sur l’Ontario français, amuseurs publics et chanson-musique.

Toujours au niveau culturel, on ne saurait passer sous silence la création de La Nouvelle Scène. Centre francophone de théâtre à Ottawa, La Nouvelle Scène ouvre ses portes le 10 avril 1999. Elle abrite le Théâtre du Trillium, le Théâtre de la Vieille 17, la Compagnie Vox Théâtre et le Théâtre la Catapulte.

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Lieu de diffusion pour ces compagnies, l’organisme offre aussi une programmation multidisciplinaire de musique et chanson, de littérature et poésie, de danse, d’arts visuels et de film.

Santé

En Ontario français, le milieu de la santé a été victime d’une véritable secousse sismique qui a duré cinq ans. Il s’agit de la saga de l’Hôpital Montfort. C’est le 24 février 1997 que la Commission de restructuration des services de santé de l’Ontario, composée uniquement d’anglophones, annonce la fermeture de l’Hôpital Montfort, situé dans l’Est ontarien.

Le 22 mars, un rassemblement monstre réunit quelque 10 000 personnes au Centre municipal d’Ottawa pour protester contre la fermeture de l’Hôpital Montfort. Une telle mobilisation confère à S.O.S. Montfort le statut de défenseur des droits des Franco-Ontariens. La bataille se joue en Cour divisionnaire de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, le 29 novembre 1999, puis en Cour d’appel de l’Ontario le 7 décembre 2001. Ces deux instances donnent raison à S.O.S. Montfort.

Le 1er février 2002, le gouvernement annonce qu’il ne contestera pas cette décision devant la Cour suprême du Canada. Montfort fermé! Jamais!

Je termine ce survol avec deux gains ou fleurons de la vitalité franco-ontarienne. L’un et l’autre touchent le domaine de la télévision. Le premier constitue un événement majeur qui marque le paysage télévisuel canadien et qui se produit le 13 février 2003: Francoeur prend l’affiche à l’antenne de TFO et devient la première série dramatique canadienne (destinée à un auditoire adulte francophone) à être réalisée à l’extérieur du Québec.

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Le second gain ou fleuron est une victoire rendue publique le 29 juin dernier. Ce jour-là, le gouvernement de l’Ontario annonce son intention de donner à TFO sa pleine autonomie. Madeleine Meilleur, ministre délégué aux Affaires francophones, précise que TFO sera dotée d’ici un an de son propre conseil d’administration et sera gérée de façon autonome, tant sur le plan administratif qu’au niveau budgétaire.

J’étais présent au gala qui a souligné l’entrée en vigueur de la Loi sur les services en français. Le chanteur Paul Demers entraînait une foule délirante qui entonnait Notre place. Vingt ans plus tard, on peut affirmer que ce gala marquait ni plus ni moins le début d’un temps nouveau. Il est évident que la Loi 8 ne s’applique qu’à un cadre restreint d’activités.

Elle a néanmoins agi comme catalyseur, créant un climat où tout était possible et décuplant l’énergie des forces vives de la communauté franco-ontarienne.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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