1963: «On n’imagine pas à quel point le Canada était divisé»

50 ans après la Commission Laurendeau-Dunton

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Publié 19/02/2013 par l-express.ca

Les politiques canadiennes sur les langues officielles et sur le multiculturalisme sont issues des recommandations de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, dont on célèbre cette année le 50e anniversaire. Les travaux de ce groupe, coprésidé par André Laurendeau et Davidson Dunton, ont non seulement jeté les fondements de la dualité linguistique, mais également de la diversité culturelle, en tant que valeurs canadiennes.

C’est ce qu’a rappelé le 5 février l’un des principaux intervenants actuels en la matière, le commissaire aux langues officielles du Canada, Graham Fraser, dans un discours-fleuve à l’Université d’Ottawa qui inaugurait une série de rencontres sur le sujet.

Son homologue provincial François Boileau, commissaire aux services en français de l’Ontario, a qualifié cette présentation de «sublime», indiquant dans son blogue que «c’est le moment ou jamais de vous familiariser de nouveau avec le legs de la Commission royale».

Le texte intégral se trouve sur le site du commissaire: www.ocol-clo.gc.ca/html/speeches_discours_f.php

Époque mouvementée

Le début des années 1960 correspond à une période turbulente au Québec, indique M. Fraser. Au Parlement fédéral, 26 nouveaux députés québécois du Crédit social mitraillent le gouvernement conservateur minoritaire de questions embarrassantes sur le fonctionnement quasi unilingue anglais du gouvernement et de ses agences.

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L’idée d’une commission royale a été proposée pour la première fois en janvier 1962 par André Laurendeau dans un éditorial du journal Le Devoir, et c’est le 18 décembre 1962 que Lester Pearson, chef de l’opposition à l’époque, a demandé la création d’une commission royale. Les Libéraux réussissant finalement à former un gouvernement minoritaire, la Commission est créée en juillet 1963.

Cette année 1963 marque aussi le début des activités terroristes du Front de libération du Québec.

Laurendeau a mis du temps à accepter la coprésidence de la Commission parce qu’il ne voulait pas quitter Le Devoir ni compromettre ses convictions nationalistes. Davidson Dunton, lui, était un homme modéré et prudent qui occupait alors le poste de président de l’Université Carleton.

Frank Scott

Selon Graham Fraser, toutefois, «les grands débats et la plus grande tension au sein de la Commission étaient liés à l’approche de Laurendeau et à celle de Frank Scott».

Ce dernier était doyen de la Faculté de droit de McGill et représentait donc la minorité anglophone du Québec au sein de la Commission. Il soutenait essentiellement l’idée d’imposer un modèle bilingue (celui du Québec de l’époque) à tout le Canada alors que Laurendeau insistait sur la nécessité de maintenir deux groupes unilingues.

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Les deux hommes convenaient que le statu quo d’un «Québec bilingue dans un Canada anglophone», était inacceptable. Mais leur vision ultime de l’avenir était assez différente. Déjà, Laurendeau décrit le Québec comme une «société distincte».

Crise? Quelle crise?

«Il est facile d’oublier à quel point la Commission a suscité la controverse et des critiques», mentionne-t-il, notamment pour son rapport préliminaire, qui stipulait que «le Canada connaissait la plus grande crise de son histoire, crise que peu de Canadiens anglais ont reconnue».

Finalement, le pays a évolué vers un compromis entre les convictions d’André Laurendeau et de Frank Scott, vers la reconnaissance de la prédominance francophone au Québec, et, parallèlement, à la reconnaissance fédérale des droits linguistiques comme droits de la personne garantis dans une charte et respectés dans l’ensemble du pays. «Il s’agit d’un legs dont nous pouvons être fiers», selon Graham Fraser.

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