À moins de vivre en ermite, sans téléphone, internet, carte de crédit, passeport ou permis de conduire, vous ne pouvez plus présumer que les «autorités» (un terme de plus en plus imprécis) ne vous suivent pas à la trace et ne sont pas au fait de la plupart de vos agissements, voire de vos intentions.
Déjà les compagnies d’assurances ont accès à votre dossier au ministère des Transports, ainsi qu’à vos antécédents judiciaires récents.
Les banques se partagent votre historique de crédit et peuvent fournir au ministère du Revenu toute information demandée sur vos activités économiques. (Et essayez de prendre une hypothèque si vous êtes en retard dans le paiement de vos impôts…)
Dans certains domaines, un progrès en contrecarre un autre: l’impact d’un meilleur fusil est atténué par l’apparition d’une meilleure armure. Ce n’est pas le cas avec la vie privée: depuis des années, elle se dégrade irrémédiablement, chaque attentat terroriste confortant nos démocraties dans leur méfiance des libertés individuelles (les dictatures, évidemment, ne les ont jamais valorisées).
Les nouvelles technologies sont toutes au service d’un espionnage plus efficace du plus grand nombre, quand elles ne vous encouragent pas à étaler vous-même vos exploits et vos états d’âme sur la place publique. Vous confiez vos préférences artistiques, vos habitudes de consommation, votre orientation sexuelle à Google, iTunes, Amazon et compagnie, qui seraient stupides de ne pas en profiter.