UP-MREF: «Une équipe légitime doit refaire tout le processus»

Les disputes entre deux groupes MREF à Toronto entraînent le déplacement de l'Assemblée générale de l'UP-MREF à Ottawa

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Publié 23/02/2010 par Guillaume Garcia

MREF: minorités raciales ethnoculturelles francophones.

Un euphémisme pour dire les francophones noirs de l’Ontario. Une formulation loin de faire l’unanimité quand on sait que certains voudraient voir naître un organisme avec le mot «noir» en évidence. Par exemple, une assemblée des Noirs francophones de l’Ontario.

Depuis la création en 2005 de l’organisme l’Union provinciale des MREF et de ses antennes locales Unions régionales, la zone de Toronto est le théâtre d’une guerre de clans, d’idées entre deux groupes qui n’ont à l’heure d’aujourd’hui plus l’appui de leur hiérarchie. L’assemblée générale de l’UP-MREF devait avoir lieu à Toronto le 6 mars, mais la situation explosive a poussé les dirigeants de l’UP-MREF à la ramener à Ottawa.

Le samedi 9 janvier se déroulait la deuxième assemblée générale annuelle de l’Union régionale du centre (UP-MREF). Après cette réunion, L’Express avait réalisé une entrevue avec Aimé Kabuya. Il se présente comme le président de l’URC-UP-MREF. Suite à cet entretien, plusieurs personnes ont fait part de leur étonnement et pointé du doigt une forme de désinformation.

Le 30 janvier, un avis de convocation circulait annonçant la tenue de l’assemblée générale de l’URC-UP-MREF. N’avait-elle pas eu lieu le 9 janvier?

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En fait, ces deux assemblées ont été organisées par deux groupes de personnes qui se réclament chacun de l’URC-UP-MREF.

Le problème n’est pas nouveau et les dissensions passées ont fait les choux gras des médias francophones de Toronto. Historiquement, lors de la création de l’UP-MREF en 2005, des entités locales devaient être établies. Six précisément.

Des réunions ont donc eu lieu dans différentes villes, dont Toronto, pour désigner les représentants locaux de l’UP-MREF. Toute la polémique et les coups tordus viennent de cette réunion qui devait voir naître l’entité locale des MREF de la région Centre de l’Ontario.

Deux entités concurrentes

Selon plusieurs personnes présentes ce jour-là, dont Eddy Lukuna et Brigitte Chatué, la discussion aurait dérapé et il y aurait eu un désaccord fondamental menant à une contestation du processus d’installation de l’URC.

Le président de l’UP-MREF, Séverin N’Dema Moussa aurait alors quitté la pièce, refusant de poursuivre les discussions. Les personnes présentes continuèrent la réunion et s’établirent comme l’antenne régionale de l’UP-MREF pour la région du Centre de l’Ontario. Le président de l’UP-MREF ne validera jamais cette URC et nommera des personnes de son CA provincial à la tête de l’entité locale de la région du Centre, qui prendra pour nom UP-MREF-Région du Centre, avec Aimé Kabuya comme président.

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Cela donnera lieu à l’existence de deux entités locales représentant la même région.

Entre-temps, l’union régionale du Centre s’était faite incorporée au niveau gouvernemental. La situation est donc la suivante: une entité reconnue du gouvernement, mais pas de l’UP-MREF, et une autre légitimée par l’UP-MREF, inconnue du gouvernement. Après plusieurs années de dysfonctionnement, les deux URC décident de s’asseoir à une table et de fusionner. 
www.lexpress.to/archives/2245/

La fusion avortée

Eddy Lukuna et Aimé Kabuya prennent la tête de ce nouvel organisme fusionné. Il ne sera jamais reconnu par l’UP-MREF, dont le président à l’époque parlait en ces termes: «Je ne veux pas enflammer la polémique, mais ce que je peux dire, c’est que cette nouvelle association n’a aucun rapport avec nous. Le seul rapport, c’est la présence de notre administrateur Aimé Kabuya dans cet organisme. Et s’il est encore membre de l’UP-MREF, c’est peut-être juste parce qu’il n’existe pas dans notre association de mécanisme d’expulsion»! Ça a le mérite d’être clair!

Certains affirment que finalement la fusion n’a jamais vraiment eu lieu, d’autres comme Aimé Kabuya prennent moins de pincettes: «La fusion a eu lieu, mais après, la bande de clowns (Eddy Lukuna, Brigitte Chatué?) a continué avec leurs sous-bassements». Il reconnaît tout de même que le président de l’UP-MREF, Séverin N’Dema Moussa est pour beaucoup dans le dysfonctionnement de l’organisme. Il fait aussi porter le chapeau à l’URC menée par Eddy Lukuna pour les troubles semés dans la communauté.

Les deux groupes ont des arguments absolument contraires, l’un dit noir l’autre dit blanc, sans mauvais jeu de mots, et on ne peut tirer grand-chose de leurs déclarations respectives.

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Encore récemment, une série de courriels a circulé mettant en cause divers représentants des MREF de la région de Toronto qui s’accusent mutuellement des déboires qui se succèdent. Chacun tente de discréditer l’autre avec des méthodes plus ou moins habiles et souvent ridicules.

Les relations avec l’AFO

Brigitte Chatué, vice-présidente de l’AFO et représentante MREF au sein de l’organisme est largement mise en cause par L’UP-MREF et une de ses antennes locales de Toronto, celle emmenée par Aimé Kabuya.

L’AFO n’a jamais vraiment réussi à travailler avec l’UP-MREF, qui ne reconnaît pas l’organisme centenaire comme représentant de la francophonie ontarienne dans sa globalité.

À l’époque, on mettait ça sur le dos de l’inexpérience et la nécessité pour les MREF de se solidifier avant d’entamer des négociations et des discussions.

«Pour l’instant, ils sont en phase d’organisation, de développement, ce n’est que plus tard que nous pourrons mener des projets communs. Notre rôle, nos responsabilités sont clairs. On représente la communauté francophone dans son ensemble, cela n’enlève rien à l’UP-MREF qui a également son travail à faire», disait Mariette Carrier-Fraser.

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Mais les choses sont allées de mal en pis. Les relations sont aujourd’hui toujours compliquées. Brigitte Chatué témoigne: 
«À l’UP-MREF, on nous traite de traîtres parce qu’on travaille avec des Blancs.»

Une vision auto-destructrice

Il est aussi là le cœur du problème. L’UP-MREF et son président Séverin N’Dema Moussa sont critiqués pour leur vision «noire» de l’UP-MREF et de ses actions dans la francophonie.

«Son idéal, c’est une assemblée des noirs francophones de l’Ontario», glisse un représentant MREF.

Brigitte Chatué critique aussi cette vision: «C’est dangereux de penser comme ça. C’est ce discours qui a créé toute la chicane. C’est une philosophie qui apporte plus de problèmes que de solutions.»

Aujourd’hui, le président de l’UP-MREF voit sa crédibilité remise en cause autant par la branche représentée par Eddy Lukuna ou Kabongo Touré que par celle d’Aimé Kabuya. Point positif pour un redémarrage du processus, il ne devrait pas se représenter comme président à la prochaine assemblée générale. L’Express a bien tenté joindre le président de l’UP-MREF pour clarifier certains points mais ce dernier s’est refusé à tout commentaire.

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Quel avenir pour les MREF?

Le grand défi pour l’UP-MREF, lors de sa prochaine assemblée générale sera de mettre au clair la situation qui existe à Toronto, pour le bien de tous. Si elle veut représenter les minorités raciales ethnoculturelles francophones de l’Ontario, l’UP-MREF doit s’ouvrir à d’autres communautés.

Parce qu’il faut appeler un chat un chat, qu’est-ce qu’on entend derrière MREF? Les populations noires francophones; ou bien les populations non-blanches francophones; ou encore les francophones non Canadiens-Français?

Tant que cette question ne sera pas réglée, le mandat de le l’UP-MREF restera flou. Même si les MREF se disent représentants des noirs francophones, on remarque facilement que plusieurs communautés noires ne sont pas impliquées dans le processus.

Les préjugés racistes existent aussi entre Noirs et quand un représentant MREF dit en substance que les Sénégalais et les Maliens sont des fainéants et attendent toujours que les autres fassent le boulot pour pouvoir bénéficier de leur travail après coup, on se dit que la route sera encore longue pour que les MREF s’unissent vraiment.

L’assemblée générale du 6 mars devra reprendre à zéro la mise en place des unités locales de l’UP-MREF, comme le rappelle Brigitte Chatué, vice-présidente de l’AFO: «Ils ont raté le processus de mise en place des entités locales. La seule chance de s’en sortir le 6 mars, c’est de mettre en place une équipe légitime qui refait tout le processus. Il faut faire table rase.»

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On saura le 6 mars si les MREF reprennent en main leur destin et repartent sur de bons rails ou s’ils continuent de s’enfoncer dans les dissensions et le flou total.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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