Un vote homophobe?

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Publié 03/11/2010 par François Bergeron

Un de mes amis, qui est d’origine africaine, m’assure que George Smitherman aurait été élu maire de Toronto s’il était hétéro.

La plupart des immigrants habitant les quartiers populaires de la périphérie, où Rob Ford l’a emporté, sont encore fidèles au Parti libéral, soutient-il. Ils s’intéressent aux questions de logements sociaux et de transport en commun auxquelles Smitherman était plus sensible. Les promesses de réduction de taxes ont peu d’effets auprès de cette classe de contribuables qui ne «contribue» pas encore tant que ça. Plusieurs veulent faire venir d’autres membres de leur famille au Canada et n’ont sûrement pas apprécié que Rob Ford dise que Toronto ait «trop» d’immigrants ou que la métropole n’arrive plus à les intégrer.

Mais ils ne peuvent pas supporter l’idée d’un maire gai, encore moins «marié» à un homme, et s’affichant comme tel publiquement. Pour un grand nombre de néo-Canadiens, c’est indécent. Certains craignent même que ça soit contagieux!

«Ça se discutait à l’église», rapporte mon ami, qui est croyant et pratiquant comme un certain nombre de gens originaires d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. Ça se discutait sûrement aussi dans d’autres rassemblements ethniques ou communautaires. L’histoire du commentaire homophobe à la radio tamoule, dans les derniers jours de la campagne, ne serait que la pointe de l’iceberg.

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Mais c’est certainement difficile d’en discuter ici, dans les pages de L’Express, ou dans les grands médias, où l’orientation sexuelle de Smitherman a rarement été mentionnée. On a sans doute souligné plus souvent le tour de taille de Ford.

Smitherman lui-même a peut-être été mal avisé de choisir comme slogan «A man with a plan», et surtout, sur son annonce la plus diffusée, de se décrire avant tout comme «a strong fighter for human rights». Y a-t-il un problème pressant de non-respect de la dignité humaine à Toronto? Seuls les bureaucrates de la Commission des droits de la personne répondraient oui à cette question. Ce qui nous a rappelé que Smitherman est un défenseur de cette agence qui, en voulant éradiquer l’homophobie (entre autres), finit souvent par bafouer la liberté d’expression et la liberté de presse, un plus grand malheur.

Les préjugés anti-gais ne sont pas répandus que chez les immigrants. Des Torontois de longue date n’acceptent pas encore complètement la normalisation, encore moins la promotion, de l’homosexualité, à laquelle l’élection de Smitherman aurait contribué. Mais ce n’est pas demain la veille qu’un sondage réussira à mesurer exactement à quel point ce sentiment a joué le 25 octobre dernier.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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