Laurence Jalbert est une artiste qui se refuse de tricher, de reconnaître – et d’exploiter – tout ce que l’art comporte d’artifice. Tandis que l’industrie de la chanson mise plus que jamais sur le dévoilement des nénés et des nombrils, la Gaspésienne prend le parti de la mise à nu émotionnelle. C’est à la fois sa plus grande vertu et sa principale faiblesse.
Avec Tout porte à croire (Audiogram), Jalbert s’impose comme la contrepartie féminine d’un Richard Séguin, non seulement pour sa prédilection pour une palette instrumentale invariablement country-rock, mais surtout dans le sens où elle voit en l’écriture une occasion de se livrer avec pudeur et honnêteté, bannissant toute trace d’ironie de ses chroniques du quotidien.
Le titre même de ce septième album, profession de foi au sens large, laisse comprendre que Laurence n’a pas noirci ses cahiers pour faire du style, mais pour revendiquer son côté anti-star («Des filles comme moi/Ça pardonne tout, ça fait confiance/Ça vit des vies/Qui se racontent pas»), ou pour cerner ces expériences douloureuses qui laisseraient la plupart d’entre nous sans voix («Les mots sont inutiles/…/Mon enfant est parti avant moi/J’ai beau essuyer la glace/Il y a quelqu’un à ma place/Qui a ma forme/Qui a ma voix»).
Ce qu’il y a de curieux, dans la facture de cet album, c’est de constater jusqu’à quel point ce travail d’observation, ce regard posé tantôt vers l’intérieur, tantôt vers les autres, semble avoir déteint sur sa façon de chanter. Alors qu’à ses débuts, la fougueuse rouquine déployait ses tics de Janis Joplin pour nous en mettre plein les oreilles, elle favorise désormais le mode de la confession, oscillant entre la parole et le chant pour mieux nous livrer ses petits secrets.
Si une telle approche sied à son nouveau répertoire, elle mise sur une connivence dont on peut se sentir exclu, comme si l’on tombait au milieu d’une conversation entre copines qui se côtoient depuis l’enfance.