Tout le monde évolue

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Publié 15/04/2008 par François Bergeron

Pourquoi, dans certains milieux, trouve-t-on difficile de croire en la sincérité des excuses présentées par le député fédéral de Regina, Tom Lukiwski, suite à la diffusion par le NPD d’une vidéo amateure vieille de 17 ans contenant des commentaires offensants sur les homosexuels?

Le Premier ministre Stephen Harper – lui-même auteur de quelques perles qu’il répudierait ou qu’il formulerait autrement aujourd’hui – a raison de refuser de punir son député. Celui-ci s’est immédiatement excusé (sa longue déclaration au Parlement est affichée sur son site Web), non seulement auprès des gais et lesbiennes mais aussi auprès de tous les Canadiens, qui ont évolué sur cette question peut-être plus que sur n’importe quelle autre ces dernières années.

C’est justement pour cette raison que les sentiments du député Lukiwski sont parfaitement crédibles. Qui, à 50 ou 60 ans, a exactement les mêmes opinions, la même vision du monde, qu’à 20, 30 ou même 40 ans? Je ne souhaiterais pas, moi non plus, que mon attitude envers les homosexuels il y a 15 ans me soit encore attribuée telle quelle aujourd’hui.

Même si les conversions «bibliques» et les changements de cap de 180 degrés sont rares, tout le monde évolue. Pas obligatoirement sur tous les sujets: les années qui passent, les événements et l’expérience peuvent même nous conforter dans des opinions formées il y a longtemps. Car si on peut se tromper et commettre des erreurs de jeunesse, on peut aussi avoir eu raison et avoir fait quelques bons coups dès le début. Comme on peut continuer de se fourvoyer jusqu’à la fin.

Chez les Libéraux, Michael Ignatieff s’est excusé d’avoir soutenu la guerre en Irak (jusqu’à la fin de 2006!), une erreur de jugement majeure commise alors qu’il était au sommet de sa carrière académique. Bob Rae est passé du NPD au Parti libéral (lui aussi en 2006), une évolution moins spectaculaire que s’il s’était joint au Parti conservateur. Mais ce n’est pas comme s’il avait simplement milité au NPD quand il était étudiant: il a été député fédéral puis Premier ministre de l’Ontario sous cette bannière!

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Même si nous n’avons pas tous la même définition du progrès, nous pouvons croire, jusqu’à preuve du contraire, que Lukiwski, Ignatieff, Rae ou Harper n’ont pas agi uniquement par opportunisme en changeant de discours sur l’homosexualité, la guerre, le dirigisme ou le bilinguisme.

Dans les milieux intellectuels, on ne compte plus les exemples de penseurs libéraux qui ont déjà été socialistes. On voit parfois des vedettes de cinéma ou de la musique embrasser une religion ou une cause politique qui efface leur ancienne personnalité. Presque tout le monde connaît quelqu’un qui, sans avoir tout abandonné, a pris une tangente originale qui peut nous paraître inquiétante ou salutaire.

Nous vivons dans un univers, une biosphère et des sociétés dynamiques, qui régressent parfois mais qui, à long terme, évoluent pour le mieux. Les individus aussi.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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