Stéphane Dion a-t-il un Plan A?

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Publié 12/12/2006 par François Bergeron

Stéphane Dion était le meilleur choix des Libéraux, qui ont désormais autant de chances que les Conservateurs de Stephen Harper de faire élire un gouvernement majoritaire aux prochaines élections.

Les délégués libéraux ont fait preuve d’une maturité rafraîchissante, en fait complètement atypique et inattendue, en faisant fi de considérations superficielles comme les lunettes de professeur et l’accent québécois en anglais pour rejeter deux vedettes de «l’establishment» beaucoup mieux financées.

Les Conservateurs semblent eux aussi avoir été pris au dépourvu: leurs premiers commentaires, à l’effet que Stéphane Dion représenterait l’antithèse du renouvellement pour le Parti Libéral et n’aurait pas accompli grand chose comme ministre de l’Environnement, sont plutôt faibles. Comble de l’hypocrisie: ils sont même allés jusqu’à dénoncer le fait que Stéphane Dion a laissé les députés libéraux libres de voter selon leur conscience sur un «droit fondamental» comme le mariage gai, alors qu’eux-mêmes votaient librement pour l’éliminer!

Le nouveau chef du Parti Libéral du Canada n’a aucun gros handicap que les Conservateurs auraient su exploiter. Michael Ignatieff avait commis trop d’erreurs de jugement, Bob Rae avait ruiné l’Ontario, Gerard Kennedy ne possédait aucune expérience sur la scène fédérale. De plus, Stéphane Dion a été épargné par le scandale des commandites et il n’a pas participé à la guerilla Chrétien-Martin.

Son programme n’est pas très original et reste vague – qui ne souhaite pas la paix dans le monde, la prospérité réconciliée à la justice sociale et à la protection de l’environnement, avec l’unité nationale en prime? – mais, plus centriste et traditionnel, le programme libéral a l’avantage d’exiger moins d’explications, de justifications et de garanties que celui des Conservateurs. Ces derniers pourront cependant rappeler que leur parcimonie et leurs réductions de taxes et d’impôts procèdent d’un plus grand respect envers les contribuables et d’une saine volonté de circonscrire la bureaucratie.

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Comme Harper, Dion est un intellectuel qui maîtrise ses dossiers, mais là s’arrête la comparaison. Harper compense son manque de charisme par un contrôle quasi-maladif de l’information qui sort de son bureau et de son parti. Dion paraît plus simple, plus humble, voire plus honnête; des qualités qui risquent de séduire un grand nombre de Canadiens.

Porte-parole fédéraliste pendant le référendum québécois de 1995, puis ministre des Affaires intergouvernementales (lire: de l’unité nationale), Stéphane Dion a longtemps été associé au «Plan B», c’est-à-dire à la ligne dure contre les souverainistes québécois. (Harper aussi, à l’époque du Parti Réformiste.) Dion devra maintenant démontrer qu’il a aussi un «Plan A», c’est-à-dire un programme de réformes des institutions qui ferait qu’une majorité de francophones pourraient un jour être plus fiers d’être Canadiens qu’à l’heure actuelle.

Un tel «Plan A» passe par la promotion du bilinguisme d’un océan à l’autre, donc du français et de la culture canadienne-française qui est largement québécoise. On stimulerait aussi le patriotisme canadien en se débarrassant une fois pour toutes de la monarchie pour proclamer la souveraineté… du Canada.

Mais il semble que Stéphane Dion fera surtout campagne sur la protection de l’environnement, sur ce qu’il appelle l’économie durable et évidemment sur la résistance face aux changements climatiques. C’est plus rassembleur et, surtout, c’est à la mode.

Je ne doute pas que Dion – comme beaucoup de monde – croit sincèrement à l’urgence d’agir pour retarder le réchauffement de la planète et influencer les changements climatiques. Selon moi, c’est là une folie douce qui risque de détourner beaucoup d’efforts et de ressources de la lutte contre la vraie pollution, les vraies désastres, les vraies pratiques industrielles néfastes. Heureusement, il y a souvent convergence entre ces deux combats.

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La table est donc mise pour un solide débat d’idées entre Conservateurs et Libéraux au cours de la prochaine campagne électorale.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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