Retour en France en pleine pandémie: tout un périple

La distanciation physique était absente autour du carrousel à bagages de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle. Photos: courtoisie Leslie Garrido-Diaz
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Publié 06/06/2020 par Sébastien Durand

C’était une décision très difficile à prendre pour Leslie Garrido-Diaz. Meurtrie par le décès de son père en France, la jeune femme a dû composer avec le besoin de revoir une dernière fois cet être cher et les risques d’une contamination.

Le 31 mars, alors que la France se classait au 5e rang des pays les plus touchés par la CoViD-19, Leslie Garrido-Diaz, une Française de 28 ans habitant en Saskatchewan, embarquait pour un périple de huit semaines, qui s’est conclu au retour par une quarantaine à Regina.

Trois avions et un train

Perdre un parent est une étape douloureuse de la vie. Et quand ce parent se trouve à plus de 7000 kilomètres, sur un continent fortement touché par une pandémie, l’épreuve revêt une dimension particulière.

Pourtant, rien n’aurait pu arrêter Leslie. Malgré toutes les mises en garde, elle n’a suivi que son cœur au moment de réserver les trois vols et le train qui allaient la conduire de Regina à Bordeaux, via Toronto, Francfort et Paris.

Des aventures, elle en a vécu tout au long de son voyage. Armée de son masque, de ses gants et de son gel hydroalcoolique, elle a plongé dans un monde aux allures apocalyptiques: avions quasi vides, grands aéroports sans âme, contrôles réguliers, restrictions de sortie, etc.

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Pendant cinq semaines, son quotidien en France sera ensuite rythmé par des démarches administratives, du télétravail et quelques rares sorties. Leslie a quitté son pays natal avant le début du déconfinement pour échapper aux foules, mais son retour au Canada s’est malgré tout soldé par une mise en quarantaine sous haute surveillance.

Leslie Garrido-Diaz portait un masque durant ses trajets.

Des Français plus laxistes

Dans l’avion qu’a pris Leslie, tout le monde portait un masque. Et gare à ceux qui dérogeaient à la règle: «Les passagers […] étaient rappelés à l’ordre par le personnel de bord dans le cas où ils ne respectaient pas les conditions sanitaires pendant le vol.»

Si les passagers apprécient d’ordinaire les vols transatlantiques pour leurs services à bord et leurs repas, la formule a bien changé. Désormais, c’est «repas froid, type ration de l’armée, dans une boite scellée et avec un temps limité pour le manger», indique la voyageuse.

À son arrivée en France, Leslie a été surprise de passer la douane sans «aucun contrôle de CoViD-19 à Roissy». Au moment de récupérer son bagage, elle est restée en retrait tandis que d’autres voyageurs s’agglutinaient autour du carrousel, faisant fi des règles de distanciation.

La jeune femme subira cependant un contrôle de température à la gare Montparnasse pour prendre son train pour Bordeaux. Arrivée sur place, il lui reste un ultime trajet en bus, mais les gestes barrière sont largement bafoués.

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«J’avais parcouru 7000 kilomètres en prenant toutes les précautions nécessaires, je n’avais aucune envie de tomber malade en 40 minutes, le temps de me rendre jusqu’à la maison.»

Aucune file d’attente pour passer la douane à l’aéroport de Paris.

Confinée en France

La France est alors confinée. Les habitants doivent remplir un formulaire lors de chaque déplacement. Leslie confie: «Je ne pouvais sortir qu’une heure par jour et pour une raison particulière comme faire l’épicerie, assister une personne de la famille, se rendre chez le médecin.»

Les funérailles de son père se tiennent à huis clos, la limite étant alors fixée à cinq personnes. Étant donné que la famille est nombreuse, sa maman doit même rester à la maison pour respecter la limite.

À l’arrivée de Leslie en France, la ville de Paris était encore confinée.

Travail à distance

Leslie ne prendra que quelques jours de congés pour s’occuper des démarches administratives avant de reprendre à distance son travail de coordination pour la Société historique de la Saskatchewan.

Avec un décalage de huit heures entre la France et la Saskatchewan, les réunions demandaient une certaine organisation: «Le plus compliqué était pour l’une des classes que je suivais. Mon cours était à 18h45, heure de Regina, donc je devais me réveiller à 2h30 du matin pour le suivre jusqu’à presque 5h.»

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Leslie reconnait cependant avoir été chanceuse: «J’ai la chance d’avoir une bonne équipe de travail, une direction très compréhensive et une mère qui s’adaptait à ma routine, même si je devais moi aussi me réadapter à la vie française.»

La plupart des sièges étaient vides sur le vol Air France Paris-Montréal de Leslie.

Un retour sous haute surveillance

Son retour au Canada tranche singulièrement avec son arrivée en France. Cette fois, Leslie se voit poser une série de questions à son premier point d’entrée à Montréal.

Il est question de son état de santé, mais aussi et surtout de son plan de quarantaine. Elle finira «séparée des autres passagers pour attendre [son] vol vers Toronto».

À partir de Toronto, Leslie n’est plus isolée des autres passagers, mais un agent vient l’interroger avant chaque vol pour lui demander comment elle se sent. De plus, elle doit signer un document déclarant qu’elle accepte d’être contactée, par téléphone ou par visite, par un agent de l’Autorité de la santé.

Pendant sa quarantaine, Leslie a reçu un tiramisu de la part d’un ami.

Choyée en quarantaine

À l’aéroport de Regina, elle récupère sa voiture que sa colocataire avait déposée une heure plus tôt. Elle sera hébergée par son amie Patricia, qui a aménagé l’étage de sa maison pour qu’elle puisse y vivre de façon quasi autonome pendant ses deux semaines de quarantaine.

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Outre cette hôte attentionnée, Leslie peut compter sur le soutien de la communauté. «Cela fait chaud au cœur d’avoir des amis qui déposent des gâteaux, des courses ou qui viennent causer depuis le trottoir», confie-t-elle.

Tous les trois jours, la jeune femme reçoit un appel de l’Autorité de la santé pour s’enquérir de sa santé et lui rappeler qu’elle peut se «faire contrôler à tout moment». En effet, trois jours avant la fin officielle de sa quarantaine, la confinée recevra une visite de la police. Leslie n’aura jamais montré de symptômes de la CoViD-19. Elle est désormais de retour dans sa communauté.

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