Redécouvrir les vertus de l’inflation

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Publié 13/01/2009 par Nirou Eftekhari

L’effondrement du marché boursier mondial dans la seconde moitié de 2008, le plus important depuis la Grande Dépression de 1929, a finalement porté son empreinte tant redoutée sur l’économie réelle avec notamment l’annonce de la perte massive d’emplois aux États-Unis et au Canada.

Le taux de chômage est prévu de monter rapidement aux États-Unis pour atteindre presque 9 % en 2009 contre 6,7 % en novembre de cette année. L’économie américaine, la plus importante dans le monde, avec un PIB de 14 trillions $, fait désormais face à la récession la plus sévère depuis la Seconde guerre mondiale. La crise qui sévit actuellement aux États-Unis, là où a débuté la chute des valeurs boursières, ne peut pas se poursuivre sans se répercuter sur le reste du monde, notamment sur le Canada dont les exportations vers le marché américain sont responsables d’un quart de son PIB.

Si jusqu’il y a quelques mois, avec le prix du pétrole qui avait frôlé mi-juillet 150$ le baril, l’inflation était considérée comme le danger le plus craint, désormais la déflation, la baisse des prix qu’entraîne la récession, constitue la menace la plus redoutable.

Dans une économie mondialisée, l’inflation est bien sûr un handicap sérieux qui peut limiter la capacité concurrentielle d’un pays et lui faire perdre des parts de marché tant à l’intérieur qu’à l’étranger, entraînant par là une augmentation du chômage. Cependant, l’inflation peut également stimuler l’économie en encourageant les ménages à augmenter leur consommation, de peur de payer le même produit plus cher plus tard. Elle a donc un effet positif sur l’économie dans la mesure où elle soutient la demande dont dépendent l’investissement et donc la croissance et les emplois.

Dans une période de déflation, c’est tout le contraire qui se produit: croyant que les prix vont continuer à baisser davantage, les ménages décident de limiter leur consommation et d’augmenter leur épargne, privant ainsi l’économie d’une demande solvable dont la contraction conduit à la fermeture d’entreprises et à l‘aggravation de la récession. L’effet stimulant de l’inflation doit donc être comparé à l’effet récessif de la déflation.

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En général, c’est l’État qui se doit substituer les dépenses publiques aux dépenses privées qui font défaut à la reprise économique. Quelle que soit sa politique d’intervention pour soutenir la demande, les politiques monétaires ou fiscales expansives, la relance par les investissements et travaux publics, la redistribution de la richesse en faveur des couches sociales victimes de la crise en améliorant, par exemple, les conditions d’accès à l’assurance d’emploi, etc., elle entraîne généralement un déficit budgétaire qui fait augmenter la dette publique.

Dans une période de croissance normale, une augmentation non justifiée des dépenses publiques risquent d’exacerber les tensions inflationnistes et de compromettre la poursuite de la croissance, tandis que dans une période où l’avenir se présente sous des perspectives sombres, de telles dépenses sont une condition indispensable afin de modifier les anticipations pessimistes des agents et de tracer un chemin qui conduit au plein emploi en évitant des souffrances inutiles aux couches sociales les plus vulnérables.

Au total, dans une situation de crise, une politique de déficit budgétaire, avec ou sans inflation, constitue un remède efficace contre le blocage économique en même temps qu’un instrument de justice sociale. Il serait par contre très irresponsable dans une telle situation de vouloir à tout prix atteindre l’équilibre budgétaire par crainte de provoquer l’inflation en tablant sur la capacité autorégulatrice du marché et en tentant de limiter le rôle de l’État à son expression la plus simple.

C’est sur la toile de fond de ce débat concernant le rôle de l’intervention de l’État dans une situation de crise que la coalition formée par le parti Libéral, le parti Nouveau Démocratique et le Bloc Québécois s’est opposée au parti Conservateur au parlement canadien à la suite du dépôt de son plan budgétaire le 27 novembre. La Coalition reproche notamment au gouvernement de Stephen Harper, l’absence de stimulants économiques importants pour faire face à la crise économique qui se profile à l’horizon. Le nouveau leader du parti Libéral, Michael Ignatieff, a promis de reprendre ses attaques contre le gouvernement minoritaire du parti Conservateur si celui-ci ne modifie pas sérieusement sa politique économique lors du dépôt de son nouveau programme budgétaire le 27 janvier prochain.

Les mesures adoptées jusqu’à présent par le parti Conservateur pour lutter contre la récession, baisse du taux d’intérêt en octobre et au début de décembre, n’ont pas empêché la situation économique de se détériorer avec notamment la hausse du chômage.

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Tout montre donc que la crise actuelle pose des défis autrement plus graves et qu’à défaut de prendre des mesures exceptionnelles, il faudrait s’attendre à des ruptures sociales inévitables et peut-être irréparables.

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