Depuis le succès relatif, cet hiver, de la révolte populaire en Tunisie, qui a inspiré des actions semblables en Égypte, au Yémen, en Libye, en Syrie et dans quelques autres pays arabes, avec des résultats encore peu probants, il se trouve des gens, chez nous, pour rêver d’une telle révolution et scander, eux aussi, dans la rue ou dans des lettres aux journaux, «Harper dégage!»
Le 3 juin, lors de la lecture du Discours du Trône au Parlement, Brigette DePape, une diplômée de l’Université d’Ottawa âgée de 21 ans, a profité de sa fonction de page du Sénat pour manifester silencieusement son opposition au gouvernement, au milieu des députés et sénateurs, en tenant une pancarte rouge en forme de panneau d’arrêt sur lequel elle avait simplement écrit «Stop Harper!».
La photo a fait le tour du monde et suscité plus de commentaires que le Discours du Trône lui-même qui, il est vrai, ne contenait aucune surprise après une campagne électorale où tout avait déjà été exposé et débattu.
Dans le Toronto Star de jeudi, Brigette DePape explique qu’elle «sentait qu’elle avait une responsabilité d’utiliser son poste pour s’opposer à un gouvernement dont les valeurs vont à l’encontre de celles de la majorité des Canadiens». Le système électoral est «brisé», justifie-t-elle, puisqu’on se retrouve avec un gouvernement contre lequel ont voté 60% des Canadiens.
Stop! 40% des Canadiens ont voté pour les Conservateurs, 30% pour le NPD, 20% pour les Libéraux… 70% des Canadiens ont-ils donc voté «contre» le NPD? 96% «contre» les Verts? Notre système électoral pourrait certainement être amélioré, par exemple en prévoyant un second tour, voire un second choix sur le bulletin de vote, mais rien ne permet d’affirmer que les Conservateurs n’auraient pas alors recueilli une majorité de voix. Si le Parti libéral avait disparu avant le 2 mai, il est tout à fait possible que les Conservateurs aient recueilli 50% des suffrages, contre 40% pour le NPD.